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156 REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

à demi. Dans l’état où sont désormais les choses, un homme abandonné dès sa naissance à lui-même parmi les autres serait le plus défiguré de tous. Les préjugés, l’autorité, la nécessité, l’exemple, toutes les institutions sociales dans lesquelles nous nous trouvons submergés, étoufferaient en lui la nature, et ne mettraient rien à la place. » (Ibid.)

Conséquence pédagogique. Laisser faire. L’enfant a la moralité intrinsèque. L’homme doit donc se tenir à distance de l’enfant. Le jugement de celui-ci est naturellement juste. Ne, le déformons pas. De ce point de vue, toute la discussion portera sur la question de savoir si l’enfant est parfait ; s’il n’a pas de vices naturels, etc. C’est la thèse couramment prêtée à Rousseau.

Il Mais le texte qui suit devrait faire réfléchir. Texte 4 Éducation. Sa puissance

Nous naissons faibles, nous avons besoin de forces ; nous naissons dépourvus de tout, nous avons besoin d’assistance ; nous naissons stupides,-nous avons besoin de jugement. -Tout ce que nous n’avons pas notre naissance et dont nous avons besoin étant grands, nous est donné par l’éducation. » 5.) (Émile, I, p. 5.)

Nécessité de contourner la nature. Donc, il s’en faut que tout soit parfait en elle.

III. Si la pensée était celle qu’on prête à Rousseau, l’éducation devrait être réduite au minimum. On devrait laisser faire. Or, nul n’a un sentiment plus vif de la puissance et delà nécessité de l’éducation que Rousseau. L’éducation transforme la nature, la dénature. Texte 5 : La dénaturation

« L’homme naturel est tout pour lui il est l’unité numérique, l’entier absolu, qui n’a de rapports qu’à lui-même et à son semblable. L’homme civil n’est qu’une unité fractionnaire qui tient au dénominateur et dont la valeur est dans son rapport avec l’entier qui est le corps social. Les bonnes institutions sociales sont celles qui savent le mieux dénaturer l’homme, lui ôter son existence absolue pour lui en donner une relative, et transporter.le moi dans l’unité commune, en sorte que chaque particulier ne se croie plus un, mais partie de l’unité, et ne soit plus sensible que dans le tout. » (Émile, J, p. 10, voir Exemples.)

Pourquoi ? 1°) Faiblesse de l’enfant. Équilibre des désirs et des forces. N’existe pas chez l’enfant..

Faiblesse nécessaire (voir p. 89).

Texte 5 bis- : Débilité de l’enfance. Ses raisons : sa lui seraient inutiles Si l’homme naissait grand et fort, sa taille et sa force lui seraient inutiles jusqu’à ce qu’il eût appris à s’en servir ; elles lui seraient préjudiciables en empêchant les autres de songer à l’assister ; et, abandonné à lui-même, il mourrait de misère avant d’avoir connu ses besoins. » (Émile, 1, p. 4.)