Page:Revue de métaphysique et de morale, supplément 1, 1921.djvu/14

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matériel, mais la vie de l’esprit qui s’étiole. L’activité purement des individus peut-elle suffire à le réaliser ? Il ne semble pas.

La vie économique de chacun est de plus en plus dominée par celle de tous, la vie nationale par la vie internationale. Notre époque, à la suite d’une catastrophe gigantesque, est appelée à réorganiser, à la fois, dans le monde entier et dans chaque nation, le système de production et d’échange. Elle tend, d’autre part, à grouper les individus selon leurs intérêts communs de profession ou de classe, et à opposer ces groupes les uns aux autres, tant à l’intérieur de chaque pays que d’un pays à l’autre. Ainsi les vues d’ensemble n’ont jamais été plus nécessaires. Dans l’ordre théorique, il nous faut un instrument d’interprétation forgé par la réflexion, la comparaison et l’analyse, et permettant d’atteindre au delà des apparences les origines véritables des phénomènes. Dans l’ordre pratique, nous avons besoin de l’imagination constructive capable d’assigner des fins harmoniques à une activité collective, dont la direction reste livrée sans cela aux formules désuètes que les gouvernements empruntent à l’empirisme d’un passé disparu.

Une Revue comme celle-ci se devait d’essayer, à l’heure précise où nous sommes, une synthèse, si incomplète fût-elle, de ce que la réflexion économique des dernières années a pu apporter à la solution de ce double problème. Elle restait fidèle à son rôle en montrant dans le domaine économique, comme elle l’a fait dans celui de sciences mieux constituées, la fécondité pratique de la recherche théorique, le lien étroit de la vie concrète et de la pensée abstraite. Elle y restait fidèle encore en conviant à collaborer à cette tâche des économistes étrangers comme des économistes français.

L’objet des études qui suivent a donc été de stimuler l’esprit plus encore que de l’instruire, de lui ouvrir des perspectives plutôt que de lui tracer des routes. En déblayant le terrain de controverses vieillies, elles ont voulu faciliter la besogne aux travailleurs, avides de savoir, mais que la longue attente des tranchées a rendus désireux d’apprendre vite. Il ne s’agissait pas de rédiger un traité. Il importait surtout d’examiner quelques grands problèmes sous l’angle où ils se présentent aujourd’hui à ceux qui en cherchent la solution par la seule voie où l’on peut espérer la