Page:Revue de métaphysique et de morale, supplément 3, 1913.djvu/24

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– 24 – Thèses de M. E. Gilson, agrégé de philosophie. •̃̃ I. Index scolastico-cartésieii. M. Gilson. Cet « Index » ’est sorti naturellement de mon travail principal. Ayant, constaté, en effet, que Descartesavait subi, plus profondément qu’on ne l’eut cru, le travail de la philosophie antérieure et, sans doute, des enseignements qu’il avait reçus à La Flèche, j’ai:décidé de me remettre à l’école de ses professeurs en suivant les indications mêmes qu’il me donnait. Nous possédons encore les manuels imprimés qu’il a dû lire, et nos Archives ont gardé lés cahiers que ses maitres suivaient dans leur enseignement. En outre, je me suis référé plus d’une fois à saint Thomas et à Suarez. ̃̃̃Pour ce qui est des résultats, je me suis interdit de faire à proprement parler.des comparaisons; j’ai simplement indique des rapprochements possibles. Voici dans quelle direction on pourrait, à m<in sens, les poursuivre ̃ I" D’abord, on trouve dans Descartes des mots manifestement scolastiques, que l’auteur donne pour tels, et dont il rectifie la définition. Exemple âme, lieu, mouvement. ï" D’autres mots que l’auteur ne donne point pour scolastiques, quelquefois des propositions entières qu’il a prises à ses devanciers sans le dire. J’ai cru bon de tes noter, parce que le rapprochement m’a souvent amené à en modifier l’interprétation traditionnelle. Ainsi, j’ai inséré dans mon Index, un texte célèbre du Discours (texte 362).C’est une proposition scolastique. Elle est prise à Cicéron, comme l’indiquent les cahiers ». 11 m’a semblé que, sous ce jour nouveau, l’ironie de la phrase changeait un peu d’aspect et était comme transposée. Autre exemple (texte 451) dans les Principes Descartes dit que la terre, comparée au Soleil, est comme un point. Cela se rapporte à un sujet de discussion fréquente chez les scolastiques Si la terre, est un point. 3" L’auteur a repris, en beaucoup d’endroits, la pensée même des, scolastiques. Les mots » notior, notius, notum per se » sont des expressions scolastiques. M. ilumelin compare le Dieu de Descartes. avec celui d’Aristote. Or, l’expression ̃ cartésienne « Dieu est son être » vient de.. saint Thomas. Cf. aussi textes 123, 126 et 130. ̃«- 4° Voici, maintenant, un certain nombre de cas où le rapprochement servira à éclaircir beaucoup la pensée même de Descartes on se demande souvent si Descartes, est, ou non, substantialiste. Car il dit « La Substance est connue par les accidents », texte apparemment. phénoméniste.Or, j’ai trouvé que cette affirmation lui venait denses maîtres (texte 43o). Il faudrait donc dire que ceux-ci étaient phénoménistes? C’est ainsi qu’on peut fixer, en quelque sorte par l’absurde, l’interprétation de Descartes. Notons, que le. cadre de la Physique cartésienne est empruntée aux scolastiques,; que quelques explications des Météores viennent d’eux également (vapeurs etexhalaisons, météores lumineux, tonnerre, foudre, etc.), que les termes de sens commun, esprits animaux ont la même origine. Il me semble enfin que j’ai rassemblé quelques-textes cartésiens et scolastiques relatifs’à là nature, dû Temps et préparé ainsi, peut-être, une étude complète sur ce sujet. M. Picavet. Il est impossible de se rendre compte de la. valeur de votre petite • thèse sans prendre connaissance de la seconde, la grande thèse. Je tiens à louer d’abord votre impartialité,. Vous avez aussi bien limité le sujet. J’aurai plutôt des explications à yous demander que des critiques à vous adresser. De qui vient le -texte qui est placé:en tête de votre thèse?. M:; Gilson.. – Je. n’ai pas visé tel historien de la philosophie en particulier; c’est une idée courante que Descartes n’a rien gardé des philosophies antérieures; longtemps on ne .s’est même pas posé la question de. cette influence; et, récemment encore, M. Hamelin l’a niée. M. Picavet.. – Pourquoi, étant donné les textes que vousrch.oisissez, dire « index scolastico-cartésien », et non, ce que j’aurais préféré.: ".Index thomisticocartésien »? M._ Gilson. Parce qu’on distingue aujourd’hui entre ces philosophes que _j’ai cités. Ainsi il est difficile -de classer Suarez parmi les thomistes. Le mot de thomisme, peut en un sens signifier l’opposition au molinisme sur les questions de la liberté et de.la grâce, et dans ce cas il est évident que les Jésuites ne sont pas thomistes en un autre sens il désigne, contre les Scotistes, ceux qui tenaient .pour, vrai ce qu’ils croyaient être la doctrine de saint Thomas. Or à la fin du xve ..et pendant tout le xvie siècle le scotisme a précisément gagné les Jésuites, et cette influence, est très marquée chez Suarez. M. Picavet signale des auteurs allemands qui ont traité des rapports de Descartes et de la Scolastique, et ne sont pas cités dans la Bibliographie, entre