– Sa- .ce qui est manifeste et à faire le .contraire.. La contradiction est évidente. M. Delbos. Mais, alors, la contradiction serait déjà dans la Méditation, entre le haut et le bas dé la même page. Je ne le crois pas d’ailleurs l’antithèse de l’indifférence dans la volonté et de la détermination nécessaire par l’intelligence n’est pas familière à Descartes. Tout ce qu’on peut dire, c’est que Descartes a mis l’accent plus tard sur l’un des termes, mais ce n’est pas le changement d’attitude dont vous parlez. En somme, la détermination par les idées claires ne supprime, pas la liberté. Gratta naturam non tollit. Tout en étant ̃déterminée, elle, reste faculté de choix: c’est, du moins, mon interprétation. Vous comprenez, n’est-ce pas? qu’elle me gêne un peu pour admettre l’influence des circonstances extérieures. Autre point vous dites, ingénieusement, que Descartes a transposé dans l’ordre de l’intelligence ce que saint Thomas avait dit.de la volonté et du bien. Je vous avoue que je ne parlerais point de transposition car Descartes supprime la dualité du problème de l’erreur et du mal. Cette doctrine, nous la trouvons chez les stoïciens, qui font de la volonté l’essence du jugement cr’jYv.afâôeoii;. Il y a.une semblable position de ’thèses et une semblable résistance des différences. J’incline à admettre une influence directe des Stoïciens.. M. Gilson. Mais Descartes a-t-il connu la.doctrine stoïcienne du jugement? M. Strowski a mo’ntré qu’il-avait pu connaître la morale’ stoïcienne. Mais la logique? J’ai lu Guillaume du Vair et Juste Lipsé. Je n’ai trouvé, ni dans l’un, ni dans l’autre, trace de Logique. En réalité, les. termes dont se sert Descartes sont ceux mêmes de saint Thomas, assensus, electio.. M. Delbos. S’il y a un terme stoïcien, c’est bien, il me semble, celui d’assensus. Certes, nous ignorons les sources stoïciennes, mais qu’importe après tout? M. Gilson. La source thomiste est sûre. M., Delbos. Je le répète peu importe. Il y a autre chose de plus interne c’est le rapport au, Cogito. La théorie de la liberté exprime les conditions de la certitude, propre- au Cogito. D’ailleurs, il ne faut pas imposer, en général, à un ’système notre logique propre. C’est l’esprit .historique dans’l’ordre des Idées. M. E. Gilson est reconnu digne du grade. de docteur avec mention très honorable. néo-platonicien. La critique des causes finales (Principes, 111° partie, t. 1 et II) est liée à la conception d’un Dieu un,"infini, en qui il n’y a aucune division de facultés, et, par suite, pas de « conseil V. Vous avez fortement montré la persistance de ce courant. Dans le Scholie II de la Proposition 33 (Livre 1), Spinoza dit que, s’il fallait choisir entre une théorie qui attribuerait à Dieu le choix sub ralione boni et celle qui lui confère la liberté d’indifférence, il choisirait la seconde, parce qu’elle est plus d’accord avec,l’idée de la puissance intinie. C’est la même inspiration néoplatonicienne Schelling l’a signalé. Dans quelle mesure ces idées néoplatoniciennes viennent-elles à Descartes de_, Bérulle ou de Gibieuf? Je n’en sais rien, et peu importe, au fond. Mais je ferai; sur ce point, des réserves sur ce que- v.ous. avez affirmé. T"^ Dans la deuxième partie, qui concerne la liberté humaine, votre travail; est intéressant et solide; mais vos conclusionsm’inquiètent davantage. Vous montrez, en effet, que Descartes a changé d’ayis, déterminé par des circonstances extérieures, et pour ne pas se compromettre. Mais vous êtes parti de cette idée "que sa. doctrine de la liberté est contradictoire.Je n’en suis pas sûr.+-̃ • -,i^ Les textes les plus difficiles sont, assurément, les lettres au P. Mesland. Quant, à dire que la théorie des Méditations est" contraire à la liberté d’indifférence, ’et que les Principes y sont tout à fait favorables, je ne suis pas de votre avis. Nous., sommes sous l’empire d’idées survenues après coup: nous avons lu Spinoza, Leibniz et St. Mill; et il nous est difficile de comprendre que Descartes parle d’une volonté à la fois indifférente, et déterminée infailliblement par la vérité. Pour Descartes, la volonté reste-libre et garde son pouvoir de choix, même lorsqu’elle reçoit une grande clarté de l’en–tendement. Rappelez-vous la distinction n fait entre une influence d’.ordre mo-~ rai et une possibilité métaphysique du contraire (qui subsiste alors même qu’il y. a impossibilité morale), de telle sorteque, lorsqu’il distingue l’indifférence propre à la volonté comme telle de l’indifférence par rapport aux motifs, il est., encore dans le sens de sa doctrine des Méditations. ̃ s M. Gilson. Descartes a pourtant dit que, à mesure que la clarté augmente, la liberté augmente, et aussi que l’indifférence est le plus bas degré de la liberté. Donc la liberté consiste à la fois à faire Coulommiers. – Imp. Paul BRODARD.
Page:Revue de métaphysique et de morale, supplément 3, 1913.djvu/32
Apparence