Page:Revue de métaphysique et de morale, supplément 4, 1914.djvu/31

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il s’est complètement désintéressé du problème religieux. L’auteur a présenté un Biran athée ou sceptique avec Bayle. M. Delbos fait une réserve sur le mot de sceptique, et surtout sur celui d’athée. Il n’y eut pas de négation explicite de Dieu dans la vie de Maine de Biran. On peut critiquer les preuves sans nier la chose. C’est, plutôt qu’un athéisme, une incertitude sur la valeur des arguments. Dans sa première période, il a subi l’influence du déisme de Rousseau. Il n’y a pas de moment où la conversion se soit produite. Dans les derniers jours de sa vie, il est revenu à une pratique effective de la religion mais, s’il a fait intervenir la vérité des affirmations religieuses, il n’a pas fondé cela sur le fait que ces croyances sont admises. Du fait qu’il insiste sur le fondement psychologique de la croyance, on ne peut pas conclure à une demi-construction de cette croyance. Il a voulu se rendre « réceptif » à la lumière surnaturelle. Peut-on conclure des raisons qu’il a données à un demi-subjectivisme religieux, à un demi-individualisme de sa croyance ? Ceci peut être discuté. Il a horreur de de Bonald ; cette religion repousse le développement de la pensée philosophique. Sa pensée religieuse s’orientait dans un sens que l’on ne peut pas interpréter d’une façon tout à fait dogmatique. M. Delbos conclut en disant que le travail sera toujours très utile à consulter pour ceux qui voudront connaître Maine de Biran.

M. Picavet souscrit à l’admiration de l’auteur pour l’œuvre de M. Naville, et aussi aux reproches qu’il a faits à celle de Victor Cousin. Les contemporains se sont montrés très sévères, ont accusé Cousin d’avoir fait disparaître des textes. Mais Cousin ne comprenait pas comme nous le devoir de l’éditeur. Il ne veut faire connaître au lecteur que ce qui l’intéresse lui-même. Il a tronqué le texte d’Abélard, autant qu’on sache, sans préméditation.

Taine a eu une opinion avantageuse de Biran, Naville voit en lui trois aspects, l’auteur voit surtout le catholique mystique. Or a-t-il examiné qu’il convenait d’utiliser davantage le Journal Intime ? Biran avait acquis avant 1801 un certain nombre de ses idées plus tard exprimées. il a conservé aussi un bagage de notions hétérogènes, diversement groupées, qui ont servi d’aliment à toutes ses croyances. On a fait appel à son tempérament, montrant qu’il cherchait le bonheur : cette conception aurait pu être examinée ou citée. Mais la clef de la pensée de Biran, c’est dans le Journal qu’il faut la chercher, en notant les lectures qu’il a faites.

L’auteur veut expliquer l’homme extérieur par l’homme intérieur ; or Biran a vécu surtout par l’extérieur, dit l’auteur. Royaliste, la mort de sa sœur explique ses sentiments ; cela relève de l’extérieur plus que de l’intérieur.

M. Delbos fait observer que la mort de sa première femme, Louise Fournier, n’est connue que par des traditions inédites.

M. de Lavalette-Monbrun les considère comme absolument authentiques.

M. Picavet. — Biran chercha à être fonctionnaire, recteur. Il eut une vie bien extérieure. Ne se sépare-t-il pas de Destutt de Tracy et de Cabanis, qui n’ont plus aucune influence auprès de l’Empereur ? Devenu sous-préfet, il prend très à cœur sa besogne, s’occupe d’éducation c’est un homme pratique ; le voici franc-maçon. L’auteur insiste sur le fait qu’il eut besoin d’argent ; c’est encore un point de vue très pratique. Il apprend à ses dépens qu’on n’est pas idéologue impunément ; peut-être a-t-il dû à ces raisons une partie de ses résolutions. On s’est demandé si le changement de ses opinions venait de sa pensée personnelle ou du développement de la pensée ambiante. Il redevient catholique et royaliste après 1815, ayant obtenu une situation du roi. A-t-il pris les opinions des vainqueurs, a-t-il eu une évolution tout intérieure, ou y eut-il influence commune de l’intérieur et de l’extérieur ?

M. de Lavalette-Monbrun pense qu’il ne faut pas soupçonner Biran d’avoir eu un désir d’argent ; il est mort pauvre. Il s’est mêlé au monde par besoin de réaction physique. Mécontent, il porte en lui-même une sorte de mal du siècle.

M. Picavet croit qu’il aurait été bon de faire remarquer cette opposition.

M. de Lavalette-Monbrun marque le caractère complexe de tous les compatriotes de Maine de Biran.

M. Picavet insiste sur l’importance de Gallois, adversaire de Bonaparte au Tribunat. Dans cette réunion des Cinq, il a dû avoir une grande influence. Gallois aurait pu éclairer le rôle de Biran. Sur Boussion M. Picavet aurait souhaité des éclaircissements. Il importait de montrer qu’il y avait là des personnages considérables, capables d’influer sur Biran. L’auteur accorde une grande importance à Rivarol, qui n’a jamais posé pour l’impartialité. Il parle d’une rencontre entre Lakanal et Biran, vers 1815 ; cela semble contestable. L’auteur donne le nom du mémoire sur l’Habitude ; d’après lequel des trois textes fait-il l’exposition ? Selon que l’analyse est prise de l’un ou de