reste fort peu de place pour parler de l’éducation elle-même. — L’ouvrage est muni d’une préface ou se trouvent résumées les théories modernes relatives à la chronologie des dialogues. Mais, dans son exposé, M. Dantu ne veut pas distinguer ce qui appartient aux différents dialogues, et le tableau qu’il présente est fort confus. Enfin, comme M. Dantu paraît connaître d’assez loin la littérature et les institutions grecques, il ne peut faire des comparaisons qui eussent été nécessaires. — Bref, ce travail qui témoigne, malgré une rhétorique passablement désuète d’un goût assez vif pour l’histoire et de quelque érudition platonicienne, est composé selon une mauvaise méthode, et n’aura guère été utile qu’à son auteur.
Essai sur l’atomisme et l’occasionalisme dans la philosophie cartésienne, par Joseph Prost. 1 vol. in-8 de 274 p., Paris, Henry Paulin, 1907. – L’objet de ce travail est de montrer comment de la physique de Descartes ont pu sortir les doctrines atomistiques de Géraud de Cordemoy et les théories occasionalistes de Louis de la Forge et de Malebranche. L’exécution est inégale. Les chapitres sur Descartes, Malebranche et Leibniz manquent de précision et l’auteur se laisse aller, dans sa conclusion, à des considérations bien hasardées sur la filiation des grandes métaphysiques du xviie siècle. Mais les études sur Cordemoy et de la Forge seront très utiles. M. Prost donne des analyses abondantes, de longues citations et il appelle avec raison l’attention sur deux écrivains qui eurent — surtout le premier — un grand succès vers 1670. Les problèmes divers que soulève l’histoire de la diffusion du cartésianisme dans la seconde moitié du xviie siècle ne sont pas résolus par ce livre, mais on y trouvera des matériaux assez nombreux.
La philosophie à l’Académie protestante de Saumur (1606-1685), par Joseph Prost. 1 vol. in-8 de 173 p., Paris, Henry Paulin, 1907. — Cette petite monographie appartient à un genre très utile. L’histoire de la philosophie du xviie siècle est encore mal connue, parce que nous ignorons les philosophes secondaires par lesquels le cartésianisme s’est infiltré dans la scolastique. M. Prost nous fait connaître avec assez de précision deux de ces philosophes d’école, Jean-Robert Chouet et Pierre de Villemandy. Malheureusement, l’auteur manque de connaissances historiques générales et son étude, qui paraît sérieusement faite, n’est pas, pour cette raison, aussi instructive qu’on le pourrait souhaiter.
Œuvres de Spinoza, traduites et annotées par Ch. Appuhn, professeur de philosophie au lycée d’Orléans, tome I : Court Traité. — Traité de la Réforme de l’Entendement. — Principes de la philosophie de Descartes. — Pensées métaphysiques, 1 vol. in-12 de viii-570 p., Paris. Garnier frères, 1907. – C’est une bonne fortune pour les lecteurs français que l’entreprise d’une traduction des Œuvres complètes de Spinoza (à l’exception de l’Abrégé de grammaire hébreue et d’un fragment sur le Calcul des Chances), destinée à prendre la place de l’œuvre de Saisset qui a été utile, mais où apparait trop une tournure d’esprit que nous ne comprenons plus. Par contraste, on devait être fort exigeant à l’égard du nouveau traducteur de Spinoza ; on lui demandait d’être au courant des minutieuses recherches historiques et philologiques des W. Meijer, des Léopold, des Meinsma, des Freudenthal, de faire passer dans le détail même de la version française les nuances de pensée sur lesquelles ces recherches ont porté l’attention, de signaler dans les notes les points délicats où la doctrine spinoziste demeure pour nous indéterminée et obscure, et pourtant de ne pas laisser sombrer dans l’incertitude qui peut en voiler certaines parties l’inspiration profonde qui fait l’unité du tout. M. Appuhn a eu la claire conscience de ces exigences diverses, et il a réussi à y satisfaire. Nous ne pouvons que signaler ici, sans y insister, les nombreuses notes relatives à l’établissement du texte du Court Traité de Dieu, de l’homme et de la santé de son âme, la très judicieuse notice sur la position historique et sur les rapports mutuels des Principes de la philosophie de Descartes et des Pensées métaphysiques ; nous voudrions citer du moins quelques lignes de la dernière partie de la Notice consacrée au Traité de la Réforme de l’Entendement : M. Appuhn explique pourquoi Spinoza le laissa inachevé et quelles besognes lui apparurent plus pressantes : « Il avait à écrire le Traité théologico-politique et à prouver, contre toutes les sectes (celle des collégiants exceptée), que l’État peut et doit être entièrement laïque, laisser à l’individu l’entière liberté de ses pensées philosophiques et religieuses et ne permettre à aucune autorité religieuse de s’imposer par la force. Il avait à composer le Traité politique et n’a pu aller au delà du onzième chapitre. Par-dessus tout il avait à rédiger l’Éthique, à établir par la grande voie métaphysique, la seule qu’il pût suivre, que le courage et la générosité ont par eux-mêmes un prix infini, et que la moralité n’a pas