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Page:Revue de métaphysique et de morale - 2.djvu/196

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revue de métaphysique et de morale.

propre, en disant par exemple : cet homme c’est Paul, prouverai-je que je connais cet homme ?

ariste. — Non sans doute.

eudoxe. — Il faudra donc que je réponde à la question : qu’est-ce que ceci ? en me servant de tout autre nom que d’un nom propre, si je veux passer pour savant ?

ariste. — Oui.

eudoxe. — Je devrai donc me servir de noms communs, comme bleu, qui est commun à tous les objets bleus, ou sage, qui est commun à tous les hommes sages ?

ariste. — Comment autrement ?

eudoxe. — Se servir d’un nom commun pour expliquer la nature d’une chose n’est-ce point la faire rentrer avec d’autres sous un genre unique ?

ariste. — Comment cela ?

eudoxe. — Dire qu’une chose est bleue, n’est-ce point la faire rentrer avec toutes les choses bleues, dans le genre bleu ?

ariste. — Oui.

eudoxe. — Ainsi, expliquer la nature d’une chose au moyen d’un nom commun, c’est connaître cette chose d’une connaissance générale ?

ariste. Oui.

eudoxe. — Peut-on expliquer la nature d’une chose autrement que par des noms communs ?

ariste. — Nous avons dit que non.

eudoxe. — Toute explication de la nature d’une chose, c’est-à-dire toute connaissance, est donc générale ?

ariste. — Oui ; c’est ce qu’on exprime en disant : il n’y a de science que du général.

eudoxe. — Eh bien, mon cher Ariste, la science est-elle la science de ce qui existe ou la science de ce qui n’existe pas ?

ariste. — La science, si du moins elle est vraiment science, est la science de ce qui existe.

eudoxe. — Est-ce, Ariste, l’idée générale qui existe ?

ariste. — Je ne sais comment répondre.

eudoxe. — Voyons, est-ce que blanc existe tout seul ?

ariste. — Non. Il existe en quelque chose qui est blanc.

eudoxe. — Qu’est-ce donc qui est blanc ?

ariste. — C’est cet objet cylindrique par exemple.