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Page:Revue de métaphysique et de morale - 26.djvu/317

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Ces réflexions n’ont plus qu’à s’appliquer à la Terre qui repose sur son ciel, comme le voyageur sur le bateau qui le transporte, et alors son mouvement déterminé ou son mouvement propre n’existe plus. Le IIIe livre des Principes, après avoir fait cette remarque, expose tout au long— le système des tourbillons, tel que Descartes l’avait conçu jadis. Sans plus de gène qu’il n’en avait en écrivant le Monde, il pose tous les éléments de l’Astronomie de Copernic et de Galilée, complétés par sa théorie mécanique de la formation de l’ensemble planétaire, dont la Terre n’est qu’un élément semblable aux autres.

Telle est l’attitude de Descartes en 1644. La première impression qui s’en dégage est qu’il y a là un enfantillage à peine digne d’un penseur tel que lui. La convention qui lui permet de lever tout scrupule a beau porter uniquement sur le langage, et lui permettre de maintenir tous les détails de la thèse condamnée, ne semble-t-elle pas tomber du ciel juste à point pour tromper la vigilance de Rome ? Se justifie-t-elle par quelque raison sérieuse ? Est-ce que vraiment le déplacement d’un corps par rapport à ceux qui le touchent se distingue des autres par un caractère tel qu’il puisse de préférence à tous être appelé le mouvement propre du corps ? Et y a-t-il autre chose ici qu’une définition purement arbitraire ?

Mais ce qui importe, en ce qui concerne cette définition, ce n’est pas notre sentiment, c’est celui de Descartes. Or, si étrange que cela puisse paraître, j’ai l’impression qu’il prend tout à fait au sérieux sa théorie du mouvement et toutes les définitions qu’elle implique, telles que nous les trouvons exposées au second livre des Principes. Et je ne suis pas le seul : Hamelin, citant ces pages, ne songe pas le moins du monde à s’en étonner[1]. Au reste si nous nous reportons à la rédaction du Monde, quoique Descartes ait accepté jadis sans hésitation de voir dans le mouvement un simple changement de lieu, et n’ait en aucune façon senti le besoin des distinctions que nous trouvons dans les Principes, n’a-t-il pas semblé ajouter déjà une certaine importance à ce que la Terre, telle qu’il la présente dans son système, n’ait point d’autre mouvement que celui qui lui vient de son tourbillon ? Il n’était pas encore question pour lui d’éviter par ses formules les colères de Rome, mais bien d’établir

  1. Le système de Descartes, p. 318. Quelques lignes plus bas, il est vrai, Hamelin déclare qu’on a bien le droit de choisir comme repère les. corps immédiatement voisins de celui qui se meut : je ne sais s’il a bien vu que pour Descartes ce choix n’est pas arbitraire. — [Note de G. Milhaud.]