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exemple ; tantôt, comme en algèbre, c’est la représentation de symboles. Dans les deux cas, l’opération exécutée mentalement sur ces choses singulières n’est pas, comme les logiciens sont enclins à le penser, simplement auxiliaire et préparatoire. « Elle est le raisonnement lui-même » (p. 273).

M. Goblot se fait cette inévitable objection : « Il peut paraître surprenant qu’une constatation (celle du résultat de l’opération) ait un caractère de nécessité » (p. 265). C’est que cette opération a été exécutée en vertu de règles. « Le résultat constaté est nécessaire dans la mesure où il est déterminé par l’application des règles. »

Et voici la nouveauté révolutionnaire : ces règles qui assurent la possibilité de l’opération et la nécessité de son résultat, ne sont pas des règles formelles du tout. Ce sont simplement les propositions déjà admises concernant les objets dont on raisonne. « Les propositions générales, qui ne sont que des vérités quand on se borne à les contempler, deviennent des règles quand on opère » (p. 264). « Chaque vérité construite est un instrument pour en construire d’autres » (p. 276). Les lois de la nature, en tant qu’elles sont connues, deviennent les lois des raisonnements sur la nature.

Il en résulte qu’il n’y a plus de logique formelle. Si pourtant, mais sa fonction diminuée est tout ancillaire. « La logique formelle qui, depuis Aristote, prétend faire la théorie de la déduction en faisant celle du syllogisme, est une énorme et perpétuelle ignoratio elenchi » (p. 256). Les règles auxquelles « le raisonnement déductif doit sa nécessité ne sont pas les règles de la logique[1] mais les propositions antérieurement admises ; le rôle du syllogisme se borne à l’application de ces règles au cas considéré « (p. XXI, et p. 274). Il est vrai que nous lisons à la conclusion du chapitre : « En résumé, il y a un syllogisme dans chacune des démarches de la pensée raisonnante, car… aucune de ces démarches ne doit être arbitraire… Le raisonnement doit au syllogisme sa nécessité[2], à la spontanéité créatrice de l’esprit sa fécondité  » (p. 276).

Une chose est certaine : M. Goblot ne cache point son aversion pour la logique formelle en tant que philosophie de la déduction. Car il discerne en toute logique formelle deux irrémédiables défauts.

Un raisonnement formel est un raisonnement qui conclut vi formae, indépendamment de la nature des objets dont il s’agit, en

  1. C’est moi qui souligne.
  2. C’est moi qui souligne.