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Page:Revue de métaphysique et de morale - 9.djvu/10

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revue de métaphysique et de morale.

les temps les plus anciens le grand nombre dut céder aux tentations de l’égoïsme et se considérer, selon le dicton stoïcien, comme recommandé à lui-même par la nature bien plutôt que les autres et se prendre sinon uniquement, au moins principalement pour le centre de ses propres actions. Or c’est, dit Bacon, un pauvre centre pour les actions d’un homme que lui-même.

Des mortels d’élite restèrent fidèles à l’impulsion originaire, sympathiques à tout ce qui les entourait, se croyant nés, suivant une autre parole stoïcienne, non pour eux, mais pour le monde entier. Ce furent ceux que les Grecs crurent enfants des dieux et qu’ils appelèrent des héros.

La grandeur d’âme était le propre des héros. Le sort des autres les touchait comme le leur. Ils avaient conscience d’une force en eux qui les mettait en état de s’élever au-dessus des circonstances, qui les disposait à se porter au secours des faibles. Ils se croyaient appelés, par leur origine, à délivrer la terre des monstres qui l’infestaient.

Tel avait été surtout le fils de Jupiter, Hercule, aussi vaillant que compatissant, toujours secourable aux opprimés, et qui finit, en montant à l’Olympe, sa glorieuse carrière. Hercule, touché de compassion pour un vieillard dont un lion redoutable avait dévoré le fils, allait combattre ce lion et de sa dépouille se revêtait pour tou-

    fondie de tous les textes, après un long et minutieux travail de collation et de rapprochement des fragments, nous avons cru pouvoir réussir à rétablir dans ses grandes lignes la pensée tout entière de F. Ravaisson. Nous l’avons fait en nous servant uniquement des documents que nous avions sous les yeux, sans y ajouter une ligne, nous bornant à emprunter aux fragments mêmes les liens et les transitions qui devaient réunir les fragments ; nous avons mis en note certains passages que nous n’avons pu insérer dans la trame de l’exposition et qu’il eût paru néanmoins regrettable d’omettre.
    Nous espérons avoir ainsi rendu aussi exactement que possible la pensée de l’auteur, nous espérons lavoir rendue d’une manière qui ne soit pas indigne de son nom.
    Nous serons heureux d’avoir réussi dans cette tâche et d’avoir pu rendre ainsi un dernier hommage à une chère mémoire ; en tout cas, si l’œuvre paraissait à quelques-uns trop imparfaite encore, il n’en faudrait point accuser M. Ravaisson, la faute incomberait tout entière à l’inexpérience de celui qui a recueilli et rédigé ces fragments.
    Un mot encore. Le titre que nous avons choisi n’est pas inscrit en toutes lettres dans les papiers posthumes de F. Ravaisson ; il est cependant conforme à ses intentions : nous le tenons de sa propre bouche. C’est ainsi, en effet, qu’il appelait volontiers ce travail, composé presque tout entier dans les années 1899 et 1900, auquel il se consacra jusqu’à son dernier jour et qu’il considérait comme la dernière de ses œuvres philosophiques.

    Xavier Léon.