Page:Revue de synthèse historique, t. 29, 30, 31, 32- 1920.djvu/327

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aboutit d’une part à la Révolution de 89, c’est-à-dire à la prise de possession par la classe bourgeoise du pouvoir politique — et de l’autre à la Révolution du machinisme, c’est-à-dire à son installation définitive au pouvoir économique source de tous les autres — n’est-on point tenté, quoi qu’on en ait, de donner à toutes ces bourgeoisies dont on décrit la filiation et l’engendrement successif, des caractères de constance, de similitude et d’immutabilité qu’une étude attentive des faits ne permet point de constater nettement ? Quels sont, à travers cette évolution, les facteurs communs, quels les facteurs variables ? Pourquoi les uns persistent-ils ? Pourquoi, comment et à quelle date, sous l’empire de quelles causes les autres disparaissent-ils ou se transforment-ils ?

Premier effort d’analyse, qui nous amène aussitôt à en tenter un second. Le matérialisme économique proclame, sans réserves ni réticences : Les classes sont économiques ; elles résultent de l’économie. Mais en résultent-elles directement, mécaniquement, immédiatement ? La classe ne résulte-t-elle pas, au contraire, de la prise de conscience collective par tous ses membres d’un certain nombre d’idées, de désirs, de sentiments, de manières d’être intellectuelles et morales qui constituent une conscience de classe ? Mais ces idées alors, ces sentiments, ces façons d’être, quelles sont-elles et d’où viennent-elles ? Sont-elles le produit direct des conditions économiques ? Reconnaissent-elles d’autres origines ? N’y a-t-il point lieu de distinguer dans leur ensemble la part de l’imitation, celle de l’héritage, celle de la déformation plus ou moins involontaire ?

Ces idées à leur tour, comment agissent-elles, enfin, et que produisent-elles — quelle est leur influence sur la politique, la religion, la littérature, la morale, l’art des différentes classes ? Peut-on déterminer un apport politique, artistique, religieux de la bourgeoisie par opposition à un apport de la noblesse, ou du clergé, ou du prolétariat ? Plus précisément, puisque dans mon champ de cette année, je rencontre à la fois la Réforme, la Renaissance, les guerres de François Ier et d’Henri II contre Charles-Quint — qu’y a-t-il dans la Réforme, qu’y a-t-il dans la Renaissance de spécifiquement bourgeois, de spécifiquement noble ? Dans les vastes groupements d’idées et de sentiments que désignent ces noms illustres, est-il possible de faire sa part à l’esprit de classe, de délimiter des frontières, mais