de Pultawa. Le dernier rempart de l’Europe tombait devant elle ; guerrière jusque-là par nécessité, il lui était permis de ne plus l’être que par ambition.
Depuis ce moment, tous ses efforts se sont portés, en Asie, contre la Perse ; en Europe, contre la Turquie. Plus d’une fois elle a réussi à faire heurter ces deux puissances l’une contre l’autre, et tandis qu’un danger commun aurait dû les unir des liens les plus étroits, on les a vu céder à des suggestions funestes, et préparer, en se déchirant mutuellement, l’accomplissement des projets de leur ennemie. Rarement elle les a laissé reposer en même temps, et reconnaître assez bien leurs intérêts et leurs forces, pour qu’elles pussent lui résister de concert. En dernier lieu, presqu’aussitôt après avoir affaibli la Perse, en lui enlevant deux belles provinces et une somme énorme d’argent, après avoir signé un traité par lequel elle venait d’obtenir des résultats riches d’avenir, la Russie déclara la guerre à la Porte. L’Europe, préoccupée de la question grecque, vit dans cette résolution quelque chose de généreux ; c’était tout simplement la suite d’un système d’envahissement qui n’avait pas été interrompu un instant. Même au milieu de ces paix remplies d’ombrages signées entre la Porte et la Russie, cette dernière n’a jamais cessé d’avoir à Constantinople un nouveau sujet de discorde à sa disposition, et son envoyé auprès du divan n’a presque jamais laissé passer plus de la première audience, sans entamer aussitôt la discussion des objets qui devaient infailliblement amener de nouvelles ruptures.
La Russie, qui d’abord entra sur le territoire persan, sous prétexte de punir les Lesghis, descendus du Caucase, a successivement conquis sur cette puissance la forteresse de Derbend, la clef des provinces persanes, les provinces du Gilan, du Mazaderan, Asterabad et la ville de Chamakhi ; elle a acquis tous les ports de la mer Caspienne, et la