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ANGLETERRE.

bien que je n’affirme pas que dans la pratique il n’en soit pas autrement. S’ils se permettent quelque chose d’irrégulier ou d’illégal, la presse est là pour les rappeler à leur devoir. En l’absence de toutes les autres garanties, la publicité seule a pu protéger les sujets contre l’arbitraire des Magistrats : elle l’a modéré du moins et l’a empêché de se détruire par ses propres excès. C’est grâce à elle que l’institution des Magistrats, malgré sa nature éminemment despotique, a pu traverser tant de siècles, et prendre même un nouveau développement dans l’époque qui a suivi la révolution, époque de liberté pour l’Angleterre, quoique d’une liberté moindre qu’on ne le pense communément. Toutefois dans un village, la puissance de l’opinion est peu de chose, et le malheureux paysan qu’on opprime peut difficilement se faire jour jusqu’au public, à travers le mur d’airain qui l’environne de toutes parts. Les exemples ne manquent pas, d’actes arbitraires, de persécutions odieuses, exercés par des Magistrats. Mais est-il nécessaire de recourir aux faits pour assurer que de graves abus doivent être la conséquence de la cumulation de tant de pouvoirs, jointe à une entière absence de responsabilité ? Avec la moindre connaissance du cœur humain, peut-on croire qu’il en soit autrement ?

Quelques écrivains parlent sans cesse des hautes vertus, du noble caractère des Magistrats anglais ; tirés comme ils le sont de l’élite de la société, comment pourraient-ils ne pas mériter une partie au moins des éloges qu’on leur distribue ? Comme individus, leurs adversaires même se plaisent à leur rendre justice. Mais en possession d’un si vaste pouvoir, et affranchis de toute responsabilité, il est impossible que parfois ils ne se laissent point aller à en abuser.