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PÉROU.

furent bientôt après confirmés. Le général Bolivar manifesta officiellement au congrès de la Colombie son inimitié contre le Pérou, et la nécessité de ne pas réduire l’armée que la Colombie avait sur pied. Le gouvernement du Pérou se vit par là forcé de rassembler des troupes sur ses frontières, afin d’empêcher une agression, et de s’opposer aux plans hostiles qui (on ne peut plus en douter maintenant) devaient être tentés contre lui. Il agit, il est vrai, avec autant d’activité que si la campagne devait s’ouvrir incessamment ; mais on ne saurait nier aussi que, pendant le long espace de temps qui s’est écoulé, nos troupes ne sont pas entrées sur le territoire colombien, malgré leur supériorité en nombre, en valeur et en discipline. Si le Pérou avait été animé, comme on le suppose gratuitement, de l’exécrable désir des conquêtes, est-il croyable qu’il aurait inutilement épuisé ses ressources en immenses préparatifs, donnant ainsi au général Bolivar tout le temps de lever de nouvelles forces, de réunir celles qui étaient dispersées et d’opprimer la Colombie ; de telle sorte qu’il put faire regarder comme une guerre nationale celle qu’il provoquait dans l’unique but de satisfaire son ambition. Le gouvernement péruvien avait des raisons plus que suffisantes pour attaquer la Colombie, et toutes les nations n’y auraient vu qu’un acte de légitime défense ; mais le Pérou ne voulut pas oublier son ancienne et intime amitié pour cette république, ni le respect dû aux droits d’un peuple libre, sur lequel on ne peut, sans injustice et cruauté, faire retomber les funestes conséquences d’une guerre crée et allumée par un seul homme, qui, en ce moment, est la calamité de son propre pays, et menace sans cesse toutes les républiques.

Le désir de prévenir de grandes infortunes, de conserver la paix, et d’éviter le scandale qu’eussent causé deux républiques en versant avec impiété le sang de leurs fils, engagea le gouvernement péruvien à députer un envoyé extraordinaire à la Colombie, dans le seul désir de fortifier