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VOYAGE AU JAPON.

qu’ils avaient aperçu des champs semés de riz. Cette nouvelle assurait notre subsistance, mais non pas notre vie, puisque nous étions sans armes ni sans aucun moyen de défense, si par malheur les habitans de cette terre se fussent trouvés autres que ce qu’ils furent. Dans moins d’un quart d’heure nous les reconnûmes pour Japonais ; ce qui nous causa une grande joie, particulièrement à moi, parce que lorsque j’avais pris possession du gouvernement des Philippines, j’avais trouvé dans les prisons royales deux cents Japonais enfermés pour une cause qui ne me parut pas suffisamment prouvée, et non-seulement je leur donnai la liberté, mais je les fis conduire en sûreté dans leur pays, ce dont l’Empereur s’était montré fort reconnaissant à mon égard ; de sorte que je me persuadai que ce prince n’aurait pas oublié ce procédé de ma part, et je conçus une ferme assurance qu’il me témoignerait sa gratitude dans cette circonstance. Je vis depuis que je ne m’étais pas trompé.

Cinq ou six Japonais, de ceux que nous avions vus, s’approchèrent de nous, et parurent avoir pitié du triste état dans lequel ils nous voyaient, et qui était bien misérable en effet ; car les plus heureux d’entre nous avaient à peine sauvé leur chemise. J’avais dans mon équipage un Japonais chrétien, par le moyen duquel je pus leur demander où nous étions. Ils m’apprirent, en peu de mots, que nous nous trouvions dans le Japon, et à une lieue et demie de leur village nommé Yu-Banda vers lequel nous nous acheminâmes. Il faisait un froid