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DESCRIPTION DE TEMBOCTOU.

notes, que je n’osais écrire qu’en cachette. Je témoignai à Sidi-Abdallahi le désir d’être seul. Il blâma le nègre de s’être établi dans ma chambre, et me logea dans une autre maison aussi à lui, placée assez près du marché, et vis-à-vis de celle qu’avait habitée le major Laing ; il n’y avait qu’une rue à traverser pour aller de l’une à l’autre.

Souvent, assis sur le devant de ma porte, je pensais tristement au sort de l’infortuné voyageur qui, après avoir surmonté tant de dangers, éprouvé de si nombreuses privations, et sur le point de retourner triomphant dans sa patrie, fut assassiné lâchement. En réfléchissant ainsi, je ne pus m’empêcher d’un mouvement de crainte, en pensant que si j’étais découvert, je subirais un sort mille fois plus horrible que la perte de la vie, l’esclavage ! Mais je me promis bien d’agir avec tant de prudence, que je ne donnerais prise à aucun soupçon.

Je me trouvai beaucoup mieux dans ce nouveau logement ; mon hôte m’avait fait mettre une natte dans une chambre dont il me donna la clef. Les esclaves qui habitaient cette maison avaient ordre de me servir : deux fois par jour, on m’apportait de chez Sidi-Abdallahi du couscous et du riz très-bien assaisonnés avec de la viande de bœuf ou de mouton.

La ville de Temboctou est habitée par des nègres de la nation Kissour ; ils en font la principale population. Beaucoup de Maures se sont établis dans cette ville et s’y adonnent au commerce ; je les compare aux Européens qui vont dans les colonies,