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ARCHIVES GÉOGRAPHIQUES.

de sa patrie. Le silence de mort qui règne sur ces terres, interrompu seulement par les voix criardes de quelques oiseaux d’eau, un ciel nébuleux, un soleil sans force, des prairies rougeâtres, des montagnes de grès à teinte blanchâtre, des maisons en briques, dont il ne reste plus que des ruines, tout faisait naître des réflexions nombreuses sur cette terre antarctique, improductive et jetée aux bornes du monde. C’est en vain que Bougainville tenta d’y fonder une colonie française : après quelques années d’essai, au moment où ce navigateur devenu depuis si célèbre entrevoyait la prospérité de son établissement, il fallut satisfaire aux prétentions des Espagnols, et leur abandonner ce petit coin de terre qu’ils revendiquèrent comme une dépendance de l’Amérique que leur concédèrent les successeurs de Saint-Pierre. Paresseux par habitude, inhabiles à vivre là où il n’y a pas de mines d’or, les Espagnols quittèrent bientôt cette portion de territoire, plus faite pour être défrichée par des hommes laborieux, actifs, et qui savent quérir les fruits de la terre avec persévérance et avec effort, tels que les Suisses. Dans ces dernières années, la république argentine essaya de renouveler les projets de l’Espagne et d’occuper les îles Malouines, afin d’enlever à tout autre peuple la possibilité de s’en emparer. Ces îles, complètement stériles et incapables d’être cultivées, ne pourraient servir que de point militaire, destiné à commander le cap Horn et interrompre le commerce de la mer du Sud. C’était ce qui avait porté les Anglais