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VOYAGE DANS LA MER DU SUD.

pérée, que nous vîmes notre embarcation partir du navire et s’approcher de terre. Nous comptâmes les huit prisonniers. J’en fus confondu. Je ne pouvais imaginer que le capitaine eût agi d’une manière aussi maladroite que de les relâcher tous, puisque le seul espoir que nous puissions conserver était de voir ceux des prisonniers qu’on eût relâchés intercéder pour nous, afin qu’à notre tour nous intervinssions pour faire rendre la liberté à leurs frères quand nous retournerions à bord du navire. Cette sage précaution ayant été négligée, malgré ma recommandation expresse, toute espérance me parut évanouie, et je ne vis plus d’autre ressource que de mettre à exécution le dessein que nous avions formé de nous tuer nous-mêmes.

Peu de temps après que les huit prisonniers eurent été débarqués, on les amena sans armes auprès de moi, précédés par le prêtre, qui me dit que le capitaine Robson les avait relâchés tous et avait fait débarquer une caisse de coutellerie et de quincaillerie pour être offerte, comme notre rançon, aux chefs à qui il nous ordonnait de remettre nos armes. Le prêtre ajouta que, dans ce cas, il nous conduirait sains et saufs à notre embarcation. Je répondis que tant que j’aurais un souffle de vie je ne livrerais pas mon fusil qui était ma propriété, parce que j’étais certain qu’on nous traiterait, mes compagnons et moi, comme Charles Savage et Luis.

Le prêtre se tourna alors vers Martin Bushart pour tâcher de le convaincre et de le faire acquiescer à ses propositions. En ce moment, je conçus