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Page:Revue des Deux Mondes - 1830 - tome 2.djvu/355

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CONSIDÉRATIONS SUR MADAGASCAR.

l’agent anglais des discussions interminables et peu décentes sur la supériorité de leur nation respective.

Les sacrifices d’argent et d’orgueil que l’Angleterre s’est imposés pour se rendre agréable au sultan insulaire sont presque incroyables. Au Fort-Dauphin où j’ai résidé pendant un mois, deux Français, mes compagnons de table, se prenaient d’un rire inextinguible au récit qu’ils me faisaient des présens somptueux que la philanthropie britannique adressait à un chef noir, auquel les colons de l’île de France et Bourbon se croyaient fort supérieurs en importance personnelle. Le gouvernement de l’île Maurice forma pour lui en divers temps des musiciens et des soldats instruits et disciplinés à l’européenne ; l’Angleterre donne encore aujourd’hui gratuitement une éducation complète aux principaux enfans de Madagascar. Plus de trente pièces de canon, des meubles précieux, des équipemens de guerre et une grande quantité d’uniformes pour habiller en soldats anglais de véritables sauvages ; voilà par quels moyens elle était parvenue à familiariser l’esprit inculte de Radama avec l’idée que le génie d’Albion était supérieur à la civilisation française.

L’indifférence dédaigneuse que Radama rencontrait dans notre gouvernement, loin de l’indisposer contre nous, lui avait inspiré au contraire une sorte de respect pour les Français que le commerce ou d’autres motifs attiraient dans l’île ; il les écoutait avec empressement et prenait un extrême plaisir au récit de nos dernières convulsions politi-