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VOYAGE SCIENTIFIQUE AU MONT ARARAT.

s’être élevé à une hauteur de 2166 toises, on se trouva dans l’impossibilité de continuer, par suite de l’escarpement perpendiculaire de la glace. M. Parrot se détermina peu de jours après, à tenter le côté du nord-ouest, accompagné par deux de ses étudians, par le jeune diacre, un paysan et cinq soldats. Le premier jour, ils arrivèrent à la limite des neiges continuelles, et y passèrent la nuit au bivouac. Le lendemain matin, ils partirent au point du jour, se flattant d’atteindre le sommet vers midi ; mais un orage terrible et des ravins impraticables, les forcèrent bientôt à rétrograder, après avoir posé au point le plus élevé où ils étaient parvenus, une grande croix de bois avec une inscription latine. « Le mont Ararat, dit M. Parrot, dans une lettre écrite immédiatement après cette seconde tentative, n’est qu’une énorme masse de laves. Dans nos deux voyages, dans nos différentes incursions, à droite et à gauche, nous n’avons pas vu autre chose. Cependant je n’ai remarqué aucune trace de cratère, à moins qu’on ne considère comme tel un grand marais qui est au nord ouest. Il n’y a pas un seul arbre sur toute la montagne. Quelques buissons à fruits, faibles et rabougris entourent seulement le couvent. Nous ne vîmes non plus aucune trace des innombrables serpens et des bêtes féroces dont on nous avait menacés. »

Enfin le 25 septembre, M. Parrot fit une troisième tentative que le succès couronna, puisque le 27, à trois heures de l’après-midi, l’expédition atteignit le sommet de la montagne. « Ce ne fut pas, dit-il, sans des difficultés nombreuses et presque insurmontables que nous obtînmes ce résultat. À partir du point où nous trouvâmes la neige glacée, nous fûmes obligés de tailler à coups de hache, et à chaque pas, des degrés pour poser les pieds. Nous passâmes la nuit sur la montagne, au milieu d’une atmosphère d’une telle sérénité et si calme que je ressentis à peine le froid, dont l’intensité était cependant extrême. »