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VOYAGES.

Il y a quelques années, un homme ayant été convaincu d’adultère, fut, conformément à la loi du pays, condamné à être mangé. Le supplice devait avoir lieu près de Tappanouly ; on invita le résident anglais à y assister, mais il refusa, et son assistant s’y rendit à sa place avec un officier indigène. Arrivés au lieu de l’exécution, ils y virent une grande foule de peuple rassemblée ; le criminel était lié à un arbre les bras étendus. L’exécuteur de la sentence, chef d’un certain rang, s’avança vers la victime, un grand couteau à la main ; après lui, venait un homme portant un plat creux contenant une préparation que les Malais nomment sambul, et qui est faite avec du citron, du sel et d’autres ingrédiens. L’exécuteur appela à haute voix le mari offensé, et lui demanda quelle partie du corps de la victime il désirait. Celui-ci désigna l’oreille droite, l’exécuteur l’abattit aussitôt d’un seul coup et la remit au mari, qui alla la tremper dans le sambul, et la mangea ensuite. Cela fait, tous les assistans se jetèrent sur le corps du supplicié, dont chacun coupa et mangea la partie qui lui convint. Lorsque l’on eut enlevé ainsi une grande quantité de la chair de la victime, l’un d’eux lui enfonça un couteau dans le cœur ; mais ce fut sans doute par déférence pour les deux étrangers qui assistaient au supplice, car jamais l’on ne donne le coup de grâce aux condamnés.

Les Battas ont un code de lois d’une haute antiquité, et c’est par respect pour ces lois et pour les institutions de leurs ancêtres qu’ils se mangent les uns les autres. Ce code condamne à être mangés vivans, 1o ceux qui se rendent coupables d’adultère ; 2o ceux qui commettent un vol au milieu de la nuit ; 3o les prisonniers faits dans les guerres importantes c’est-à-