rite, et cependant cet homme lui imposait de la manière la plus cruelle.
Le caractère de sir Edward était empreint d’une espèce d’exaltation qui, bien loin d’être incompatible avec le désenchantement et l’expérience, en est, plus souvent qu’on ne le croit, sinon la conséquence, du moins la compagne.
Éperdument épris de la grâce et de l’esprit naïf de Tréa, il s’était bien promis la veille que cette charmante créature lui appartiendrait. Riche, puissant, habitué à satisfaire ses moindres caprices, le départ de Paul le servit à merveille. C’était à lui de faire le reste, et il se mit à l’œuvre avec la confiance d’un homme dont l’expérience et l’esprit garantissent le succès, et avec la défiance d’un amant qui aime beaucoup, et qui partant, tient trop à réussir pour ne pas craindre vivement d’échouer.
Le colonel avait remarqué l’impression qu’il avait produite sur Tréa, et jugea sur-le-champ combien elle serait favorable à ses projets.
Il était si spirituel et si aimable, que Tréa se sentit attirée vers lui par un charme doux qui tempéra, sans le détruire toutefois, le sentiment que lui faisait éprouver le mérite supérieur du colonel.
Le lendemain et les jours suivans, sir Edward continua à entourer Tréa des soins les plus assidus. Du reste, il ne parlait jamais d’amour. Il faisait mieux, il laissait voir qu’il aimait.
Il fallait, et c’était là le plus grand obstacle, il fallait amener la fiancée de Paul à entrevoir sans terreur une rupture prochaine, à se familiariser avec l’idée de renoncer à celui dont elle et son père avaient consacré les droits. C’était là une trahison qui contrariait, qui révoltait l’imagination romanesque de la jeune enthousiaste. Et puis l’éclat et le scandale d’une pareille rupture ! les propos de petite ville ! être montrée au doigt ! subir les sarcasmes, les atrocités doucereuses de ses compagnes !
Le colonel lisait dans la pensée de Tréa. Il continua donc