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Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 2.djvu/162

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VOYAGES.

moral devant lequel l’esprit épouvanté recule, surtout quand il faut le concilier avec des vertus pleines de douceur et des preuves de la plus touchante hospitalité. Le récit naïf de Lery eut un tel succès en France, qu’il obtint successivement cinq éditions. Quelque temps auparavant, Thevet avait donné ses Singularités de la France Antarctique, et ce livre, en excitant les esprits, avait éveillé la curiosité ; mais il était si loin d’offrir le charme de style qu’on rencontre chez Lery, qu’il ne put obtenir qu’une vogue éphémère. Observateur moins exact que le voyageur dont nous venons de parler, mais s’enquérant plus minutieusement que lui des croyances religieuses, Thevet est devenu précieux pour ceux qui cherchent des notions sur la mythologie des peuplades du Brésil ; et le temps a donné aux récits du cosmographe un degré d’intérêt qui ira toujours en croissant, puisque ces nations sont éteintes. Plusieurs années après (1614), Claude d’Abbeville ne se contenta pas d’écrire sa relation du Maranham, il emmena avec lui plusieurs guerriers de la nation déchue des Tupinambas, pour les faire baptiser à Paris, et offrir à une cour pompeuse l’étrange spectacle de ces sauvages, qui, après avoir amusé un moment les oisifs, moururent de douleur loin de leurs belles forêts. Nous ne craignons pas de le dire, quand, malgré l’estimable travail de Southey, on écrira un jour dans tous ses détails l’histoire primitive du Brésil, ce sera à ces trois voyageurs qu’il faudra puiser, ainsi qu’à la relation un peu romanesque du bon Hans Staden. Les ouvrages portugais seront d’un faible secours, si l’on en excepte, avec Vasconcellos, un routier du Brésil que l’on conserve à la Bibliothèque royale de Paris, et qui, ayant été écrit vers la fin du xvie siècle, contient les