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GÉOGRAPHIE DE L’AMÉRIQUE.

bornes, ils comprenaient généreusement que devant ces dons du génie le monde devait s’agrandir. Dans d’autres circonstances, les succès de Colomb n’eussent pas eu les immenses résultats qui les suivirent, résultats si rapides, si compliqués, quelquefois si imprévus, si indépendans, qu’il nous faut dès le principe abandonner cette forme de considérations générales pour suivre sans nous égarer toutes les traces de Colomb et de ses émules. C’est d’abord en décrivant les courses des découvreurs, et ensuite en racontant les progrès de la colonisation, c’est en disant comment les habitans de l’Europe se mêlèrent avec ceux de l’Amérique lorsqu’ils ne les anéantirent point, que j’essaierai de remplir ma tâche. L’histoire des progrès de la géographie de l’Amérique est aussi l’histoire de la civilisation moderne de cette partie du monde.

Lorsque l’envoyé de l’Europe quitta l’Espagne, il se dirigeait vers les régions orientales du Cathay, où il croyait aborder après une navigation plus courte que celle des Portugais ; mais un heureux obstacle[1] devait l’arrêter dans sa course, et le 11 octobre 1492, il rencontra la fameuse Guanahim, annoncée dans la nuit par la lueur d’un foyer. La découverte des Lucayes, de Cuba et de Saint-Domingue termina glorieusement ce premier et merveilleux voyage. Quel phare célèbre et construit à grands frais rendit jamais de plus grands services que cette lumière modeste qui guida la pre-

  1. C’est avec beaucoup de justesse que M. de Chateaubriand a dit : « L’Amérique barre le chemin de l’Inde comme une grande digue entre deux mers. » Une phrase aussi vraie de M. de Humboldt fait envisager la même idée sous un autre aspect : « Cette langue de terre contre laquelle se brisent les flots de l’Océan atlantique, est depuis des siècles le boulevart de l’indépendance de la Chine et du Japon. »