Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 2.djvu/55

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
45
CONSTANTINOPLE EN 1831.

en révolte, ne sera pas même une perte. Si les Osmanlis sont des inutilités ou une maladie du système européen, nul doute qu’ils ne soient rejetés en Asie ; mais si, au contraire, leur existence peut s’arranger avec la nôtre, alors leurs revers, ou ce que l’on appelle ainsi, auront servi à leur grandeur future ; ils auront déterminé de nouveaux efforts de leur part pour se remettre à notre hauteur.

La condition actuelle des rayas est le grand obstacle. Pour la modifier d’une manière complète, le Koran devrait être expliqué plus largement, comme il l’était sous les califes d’Espagne ou de Bagdad, époque où les arts et les sciences étaient entre les mains des Musulmans. Jusque là, la réforme sera toujours tronquée. Voyez : ici, des Arméniens schismatiques ; là, des Arméniens catholiques ; puis des Grecs, des Juifs, toutes nations, que la politique du sérail laisse s’enrichir tour à tour pour les spolier à son aise. Ils sont perdus pour une grande partie des directions humaines. Ils sont en tutelle et suspects ; ils font partie du butin. Leur influence dans le gouvernement n’est jamais immédiate, toujours recherchée dans un but mercantile et souvent ennemi. Leur industrie est naturellement timide, sans grands moyens, boutiquière. Dans les grandes crises, ils portent malheur. Ces derniers temps, on a vu les Arméniens de l’Asie fournir des corps de cavalerie au général Paskewitch, les Grecs et les Bulgares émigrer en foule vers les provinces russes, les rayas de Constantinople servir constamment d’agens à l’étranger, et acheter, avec l’or d’une puissance voisine, les secrets et les votes du divan.

Malheureusement les ulémas, gens de la loi, auxquels est confiée la garde de l’ordre social en Turquie, sont encore entourés de respects ; le laissez-passer du