Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 4.djvu/470

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
454
VOYAGES.

me la fit sortir très-habilement, sans grande douleur, après quoi elle employa le tabac et l’huile pour fermer le trou. On dit que si on mettait le pied dans de l’eau froide après cette opération, on aurait des attaques de nerfs très-fortes, qui ont quelquefois donné la mort en semblables occasions. Les jambes des nègres sont remplies de niguas, et présentent en petit l’aspect de montagnes et de vallées ! — On raconte qu’un moine, voulant faire connaître cette petite bête en Espagne, se l’inocula dans le pied en s’embarquant ; mais avant d’arriver à Cadix, la petite bête était devenue si grosse, qu’elle avait mangé presqu’entièrement le moine, et qu’on les avait jetés tous deux à la mer. —-Comme on porte presque toujours des bas et des souliers, il est très-facile de gagner de ces niguas, qui du reste s’enlèvent aisément le premier jour. C’est surtout dans les endroits où on épluche le café qu’elles se trouvent ; quelquefois elles se mettent dans vos mains et sous vos ongles, elles sont alors très-dangereuses, car il est difficile de les en déloger.

Il y a un grand nombre de nègres marrons dans las lomas de San-Salvador et de Cusco, où ils sont fort redoutés. Quelquefois ils descendent dans des caféiers isolés, brûlent et ravagent tout. On leur fait souvent la chasse avec des chiens comme à des bêtes fauves. Les chiens les suivent aussi bien que quelque gibier que ce soit ; et il est assez singulier, quand on se promène dans les bois, et qu’on en a un avec soi, de le voir tout d’un coup, donnant de la voix, s’enfoncer sous bois, et entendre dire tranquillement par son compagnon de voyage : Ah ! c’est un nègre marron qui aura passé là ! — La fumée de leurs feux, qui s’élève au-dessus des arbres, sert aussi à