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MARTIN LUTHER.

favorablement ma demande avec la douceur épiscopale. On porte par tout le pays, au nom de votre grâce et seigneurie, l’indulgence papale pour la construction de la cathédrale de Saint-Pierre de Rome. Je ne blâme pas tant les grandes clameurs des prédicateurs de l’indulgence (lesquels je n’ai point entendus), que le faux sens adopté par le pauvre, simple et grossier peuple, qui publie partout hautement les imaginations qu’il a conçues à ce sujet. Cela me fait mal et me rend malade… Ils croient que les âmes seront tirées du purgatoire, dès qu’ils auront mis l’argent dans les coffres. Ils croient que l’indulgence est assez puissante pour sauver le plus grand pécheur, celui (c’est leur blasphème) qui aurait violé la sainte mère de notre Sauveur !… Grand Dieu ! les pauvres âmes seront donc, sous le sceau de votre autorité, enseignées pour la mort et non pour la vie. Vous en rendrez un compte terrible, un compte dont la gravité va toujours croissant…

Qu’il vous plaise, noble et vénérable père, de lire et de considérer ces propositions où l’on montre la vanité de ces indulgences que les prédicateurs proclament comme chose tout-à-fait certaine.


LUTHER RACONTE LUI-MÊME SON ENTREVUE, À AUGSBOURG, AVEC LE CARDINAL CAIETANO, CHARGÉ PAR LE PAPE D’EXAMINER SA DOCTRINE ET D’OBTENIR SA RÉTRACTATION.


Lorsque je fus cité à Augsbourg, j’y vins et comparus, mais avec une forte garde et sous la garantie de l’électeur de Saxe, Frédéric, qui m’avait adressé à ceux d’Augsbourg et m’avait recommandé à eux. Ils eurent grande attention à moi et m’avertirent de ne point aller avec les Italiens, de ne faire aucune société avec eux, de ne point me fier à eux ; car je ne savais pas, disaient-ils, ce que c’était qu’un Welche. Pendant trois jours entiers je fus à Augsbourg sans sauf-conduit de l’empereur. Dans cet intervalle, un Italien venait souvent m’inviter à aller chez le cardinal. Il insistait sans se décourager. « Tu dois te ré-