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La troisième division (général d’Escars), à l’exception d’un engagement de tirailleurs, ne rencontra pas davantage d’obstacles. La deuxième division (général Loverdo), au lieu de s’intercaler entre notre division et la troisième, s’était jetée sur sa droite, tournant par un immense circuit le terrain que nous avions escaladé : elle aurait donc rencontré moins de difficultés encore, si cela eût été possible ; car c’était par notre gauche qu’il y avait chance d’aborder l’ennemi.

Ce facile dénoûment commença par nous étonner beaucoup ; mais nous ne tardâmes pas à en avoir le mot. À Sidi-Kalef, nom que les Turcs donnaient à la position que nous venions de quitter, nous n’étions pas précisément où nous croyions être. Nous imaginions avoir Alger en face de nous, séparé seulement de nous par le rideau de montagnes qui se trouvait franchi : il n’en était pas ainsi : c’était à notre gauche qu’il se trouvait. Nous ne pûmes plus en douter, lorsque, ayant gravi les montagnes, nous nous rencontrâmes avec la mer, non avec la ville, qui était dépassée. Nous marchâmes alors dans la direction où nous la supposions, jusqu’à ce qu’arrivés aux sommets du Bonjarcah, qui la domine, nous la vîmes tout-à-coup à nos pieds. Au même moment se montrait à l’horizon, comme une sorte d’apparition de la France, notre escadre, qui accourait combiner ses manœuvres avec les nôtres. Les Turcs campaient sous les murailles mêmes de la ville. C’était seulement après le lever du soleil qu’ils venaient se mettre en position et nous faire face. Se voyant prévenus, ils remirent avec leur apathie ordinaire à un autre jour à se défendre, et nous laissèrent achever, sans s’y opposer, l’investissement de la place.

La première division en fut chargée à l’ouest de la ville, la troisième à l’est, et le siége du château de l’Empereur échut à la seconde.

En peu de jours, une route large, unie, praticable aux voitures, côtoyant les précipices, tournant les rochers, serpentant sur les flancs des montagnes, alla de Sidi-Feruch à la queue de nos tranchées. Le génie, l’artillerie purent alors disposer de tous leurs moyens matériels, et les travaux du siége furent poussés avec activité.

Les Turcs s’y opposèrent bien par quelques sorties ; mais c’était, comme on dit, pour l’acquit de leur conscience. Au fond, par suite d’un préjugé bizarre, existant parmi eux au sujet de Sultan-Calaci, ils n’en éprouvaient nul souci. Ils croyaient, c’est-à-dire