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Page:Revue des Deux Mondes - 1832 - tome 5.djvu/725

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aisé de voir que de tels moyens d’instruction doivent exercer une grande influence sur un peuple déjà si disposé aux études graves et sévères. Mais afin qu’on tire de ces élémens tout le fruit qu’on doit en attendre, il faut que l’enseignement populaire devienne plus libre et plus répandu dans les états du roi de Sardaigne, et que l’étude des sciences morales et politiques y soit encouragée davantage. Pour parvenir à ce résultat, il est nécessaire que l’aristocratie, qui, en Piémont, conserve encore toute son influence, favorise les réformes utiles au pays. Sans nous faire ici les défenseurs de l’aristocratie piémontaise, nous dirons que, si elle est un élément de force, nous la secondons de tous nos vœux ; car, selon nous, il faut avant tout de la force en Italie. Mais nous dirons aussi qu’elle devrait comprendre plus largement ses devoirs envers la patrie, qu’elle devrait s’efforcer de perpétuer sa puissance en appelant à elle toutes les supériorités, et en se recrutant, comme celle d’Angleterre, parmi les hommes de talent, au lieu de se former un triple, mais faible rempart de parchemins vermoulus. Il faudrait que certains préjugés et certaines démarcations, qui ne sont plus de notre siècle, pussent s’effacer de la société de Turin. Il faudrait qu’un étranger n’eût plus occasion de s’étonner de rencontrer partout les portraits de Saluzzo et de Caluso, qui appartenaient aux premières familles du Piémont, et de ne voir nulle part celui de Lagrange. Il faudrait que, lorsqu’on élève un observatoire, ce fût pour concourir aux progrès de l’astronomie, et non pour lire l’avenir dans les astres[1].

C’est lorsqu’on aura fait disparaître de la société quelques usages ridicules qui divisent et affaiblissent le pays, comme

  1. Un ancien chambellan du roi Victor-Emmanuel m’a assuré que, lorsque ce prince était retiré en Sardaigne, pendant l’occupation du Piémont par les Français, il passait la majeure partie de son temps avec des astrologues, qui, comme de raison, lui prédisaient toujours qu’il rentrerait dans ses états, et que c’est uniquement par amour de l’astrologie, qu’à peine rentré à Turin, il se hâta de faire élever le nouvel observatoire qui existe maintenant sur une des tours du palais Madame.