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dité dite dans le carrosse et la capacité sur le siège, pour voir à les accorder.

— Peut-être, dit Stello.

— Jusqu’à ce que le cocher essaie de verser le maître ou d’entrer dans la voiture, ce ne serait pas mal, continuait le Docteur.

Oh ! nul doute, monsieur, qu’il ne vaille autant choisir en temps de luttes, que se laisser ballotter comme un numéro dans le sac du grand loto. Mais l’intelligence n’y est presque pour rien, car vous voyez que, par le raisonnement appliqué au choix du pouvoir qu’on veut s’imposer, on n’arrive qu’à des négations, quand on est de bonne foi. Mais dans les circonstances dont nous parlons, suivez votre cœur ou votre instinct. Soyez (passez-moi l’expression) bête comme un drapeau.

— Ô profanateur ! s’écria Stello.

— Plaisantez-vous ? dit le Docteur, le plus grand des profanateurs, c’est le temps ; il a usé vos drapeaux jusqu’au bois.

Lorsque le drapeau blanc de la Vendée marchait au vent contre le drapeau tricolore de la Convention, tous deux étaient loyalement l’expression d’une idée ; l’un voulait dire bien nettement, monarchie, hérédité, catholicisme, l’autre, république, égalité, raison humaine ; leurs plis de soie claquaient dans l’air au-dessus des épées, comme au-dessus des canons se faisaient entendre les chants enthousiastes des voix mâles, sortis de cœurs bien convaincus. Henri quatre, la Marseillaise se heurtaient dans l’air comme les faulx et les baïonnettes sur la terre. C’étaient là des drapeaux !

Ô temps de dégoût et de pâleur, tu n’en a plus ! Naguère le blanc signifiait charte, aujourd’hui le tricolore veut dire charte. Le blanc était devenu un peu rouge et bleu, le tricolore est devenu un peu blanc. Leur nuance est insaisissable. Trois petits articles d’écriture en font, je crois, la différence. Ôtez donc la flamme, et portez ces-articles au bout du bâton.

Dans notre siècle, je vous le dis, l’uniforme sera un jour ridicule comme la guerre est passée. Le soldat sera déshabillé comme le médecin l’a été par Molière, et ce sera peut-être un