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LUIZ DE CAMOENS.

faisait de son crédit. C’est une ode où il réclame l’intérêt de dom Francisco pour un savant peu fortuné, le naturaliste Garcia de Orta, auteur d’un bon ouvrage sur les plantes de l’Inde. En comparant cette ode, imprimée à Goa (1563), avec celle que nous avons dans ses Rimas, on peut juger, par les variantes, du soin que Camoens donnait à la correction de ses ouvrages.[1]

Depuis son retour de la Chine jusqu’à son départ de l’Inde, Camoens, tous les étés, s’embarquait régulièrement sur les flottes de l’état et revenait hiverner à Goa, se reposant, en faisant des vers, de la fatigue de ses expéditions maritimes. On peut rapporter aussi à cette époque ses derniers amours. Il est probable que ce fut alors qu’il adressa à sa belle esclave Barbara les vers où il lui disait que « la douceur de ses yeux calmait ses peines, et qu’il trouvait en elle la fin de tous ses maux. »

Le comte de Redondo, qui aimait assez la poésie pour fournir à Camoens les motes de ses voltas[2], mourut le 19 février 1564. Son successeur fut dom Antonio de Noronha.

Camoens devait s’attendre à trouver un protecteur dans un homme de ce nom : il ne paraît pas qu’il ait eu à se plaindre de lui ; cependant ce fut la troisième année de son administration, vers la fin de 1567, que notre poète, contre le serment qu’il avait fait à son départ, résolut de retourner à Lisbonne.

Comme il manquait d’argent pour le voyage, un certain Pedro Barreto, qui allait à Sofala prendre le commandement de cette place, charmé de la conversation de Camoens, et désirant passionnément sa compagnie, lui offrit de le conduire jusqu’à cette ville, où il trouverait des occasions faciles de retourner en Portugal. Notre poète le crut ; mais il ne tarda pas à se repentir de son marché. Pedro Barreto se conduisit bientôt envers lui en maître exigeant. Arrivé à Sofala, il mit tout en œuvre pour le retenir malgré ses promesses. Je crois que la seconde lettre

  1. Autre preuve : un sommet de Camoens adressé, en 1572, à Manoel Barata, sur l’art de l’écriture, et imprimé dans ce livre, se retrouve dans les œuvres de Camoens avec de notables changemens.
  2. Les motes sont les motifs et les voltas le développement.