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AVENTURES D’UN VOYAGEUR.

gés de se passer de cette chair coriace, faute de bois pour faire du feu. Ils débarquèrent à un endroit nommé le Grand-Rapide. Là, une multitude de serpens à sonnettes vint encore les assaillir. Les uns se chauffaient au soleil, et les autres, le corps caché sous des pierres, ne laissaient sortir que leur tête. Les Canadiens tirèrent ensemble dans un nid sous un rocher, et trente-sept y restèrent morts. À peine s’il y avait une pierre qui n’en recelât quelques-uns ! Les voyageurs étaient sans cesse sur le qui vive, et ne posaient leurs pieds par terre qu’avec la plus grande précaution. Le fleuve, dans cet endroit est bordé de saules, de cotonniers, de cèdres rouges, de sumach et d’une grande quantité de salsepareille. On vit dans les broussailles quelques lièvres qui furent facilement tués, et qui remplacèrent la chair de cheval.

La Wallah-Wallah est une rivière dont le courant est très rapide ; sa largeur est de cinquante-cinq mètres, et sa profondeur a rarement plus de six pieds. Ses eaux sont claires, et courent sur un lit de sable fin et de gravier. De là la troupe se dirigea vers le nord de la rivière Lewis, qui se trouve à quatorze milles au-dessus de la Wallah-Wallah. Cette rivière a une largeur de six cents mètres à sa jonction avec la Columbia. Plus loin, les voyageurs rencontrèrent une autre rivière qui entre dans le Lewis par le nord, et à l’embouchure de laquelle s’élevait un village de quarante tentes environ. Les habitans étaient alors occupés à la pêche du saumon. Comme c’était à cet endroit que devait finir le voyage par canots, et qu’on devait continuer la route par terre, on s’y arrêta quelque temps. « Un jour après notre arrivée, dit M. Cox, me trouvant à peu de distance en avant de mes compagnons, mon cheval marcha tout-à-coup sur une touffe de prickly pears (cactus) qui le firent tant souffrir, qu’il se mit à se cabrer et à ruer si violemment, qu’il me jeta au milieu de ces plantes. Mon visage, mon cou, tout mon corps fut horriblement déchiré à l’instant, et chaque nouvel effort pour fuir ne faisait qu’augmenter ma douleur ; car, partout où je posais mes mains pour me soulever, je ne tombais que sur ces maudites épines. Je n’osais faire le