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LITTÉRATURE AMÉRICAINE.

gnent assez bien l’aspect général de la Manche et des Castilles.

« Il y a, dit-il, dans les traits simples et sévères du paysage espagnol, quelque chose qui fait pénétrer dans l’âme un profond sentiment de sublimité. Ces immenses plaines des Castilles et de la Manche, s’étendant de tous côtés à perte de vue, sont belles et intéressantes par leur nudité même et leur immensité. On y retrouve un peu de la solennelle grandeur de l’Océan. En traversant ces vastes solitudes, on aperçoit seulement quelque troupeau, surveillé par un berger, se tenant immobile comme une statue… ou bien une longue file de mules s’avançant avec lenteur, comme une caravane de chameaux dans le désert. »

Mais pénétrons dans l’Andalousie avec notre voyageur. Hâtons-nous d’arriver à Grenade, « ce vase d’argent rempli d’émeraudes et de jacinthes. » Entrons à l’Alhambra, puis dans le jardin de Lindaraxa.

" Combien il est beau, nous dit une inscription arabe, ce jardin où les fleurs de la terre le disputent en éclat aux étoiles du firmament ! Et que comparer au bassin de cette fontaine d’albâtre, rempli d’une eau plus pure que le cristal ? Oh ! rien, si ce n’est la pleine lune, brillant au milieu d’un ciel sans nuage. »

Cette poésie arabe éclipse bien complètement toute celle de Washington Irving. Ne le suivons donc pas dans les descriptions détaillées qu’il nous donne de l’Alhambra. Sans doute elles ne manquent ni d’esprit, ni d’élégance ; mais ici ce n’est point assez. Il fallait, ce nous semble, ou bien sentir autrement de pareilles beautés, ou bien ne point essayer de les peindre. Mais l’essayist est venu là, sinon le poète. Écoutons donc l’auteur du Sketch Book nous conter quelques-unes des légendes qu’il a recueillies touchant ce merveilleux palais durant le séjour qu’il y a fait.