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REVUE DES DEUX MONDES.

Qui des deux est plus fort que l’autre.
D’une voix sourde et l’œil ardent,
Gunar répondit en grondant :
Je ne crains le fer ni la flamme ;
À dix rois j’ai fait rendre l’âme,
Je n’aurai pas peur d’une femme ;
Et de la vierge en ses efforts brûlans
Il déchira les voiles blancs.
Elle, pour punir cette injure,
Saisit la magique ceinture
Qui jour et nuit ceignait ses flancs,
Attache de Gunar et les bras qui combattent,
Et les pieds qui long-temps de fureur se débattent ;
Ensuite, déployant son pouvoir plus qu’humain,
L’enlève sans effort de sa robuste main,
Et le suspend à la muraille,
Puis de sa couche ainsi le raille :

— Il sera beau, Gunar, quand le matin viendra,
De te voir suspendu par la main d’une femme.
Ce guerrier ne craignait ni le fer ni la flamme :
Il fit à dix rois rendre l’âme,
Dira-t-on, puis du doigt chacun te montrera,
Et l’on rira. —

Comme un vaisseau ployant sous la tempête,
Sous ses discours amers, Gunar courbe la tête.
Tout triste et tout humilié,
Il veut parler, sa voix s’arrête :
Sa honte à voir ferait pitié.
Enfin ces humbles mots soulèvent sa poitrine :
— Brunhilde, je vois bien que ta force est divine,
Mais de ces nœuds délivre-moi,
N’expose pas à la risée
Ma vigueur désormais des enfans méprisée,
Je n’aurai garde sur ma foi
De lutter encore avec toi. —