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MŒURS DES JAGUARS
DE L’AMÉRIQUE DU SUD[1].
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Les naturalistes ne sont pas encore parfaitement d’accord sur le nombre d’espèces de felis que possède l’Amérique méridionale, et ce genre de mammifères est un de ceux dont la synonymie est la plus embrouillée et la plus inextricable, chaque voyageur ayant confondu des espèces différentes sous des noms semblables, ou appliqué à la même des noms différens. Quelques auteurs en reconnaissent jusqu’à quinze espèces, d’autres dix ; mais M. Temminck, qui a publié une belle monographie de ce genre, n’en admet que huit comme authentiques. Buffon, loin de porter la lumière dans ce chaos, avait consacré, de l’autorité de son nom, une foule d’erreurs nées la plupart du système qu’il s’était fait à priori sur la taille inférieure des animaux de l’Amérique, sans parler des couleurs exagérées sous lesquelles il avait peint les mœurs de ces animaux, en prêtant aux grandes espèces une soif inextinguible de carnage qui les portait à détruire sans nécessité tout être vivant qui s’offrait à eux. Des expériences directes et le scalpel des anatomistes, en dévoilant l’organisation intime des animaux et les penchans qui en sont les conséquences, ont fait évanouir ces tableaux d’une imagination poétique, et prouvé qu’une férocité invincible n’est pas plus l’apanage du tigre royal et du jaguar que des autres espèces de la famille des

  1. Nous puisons dans un manuscrit de voyages qui nous a été confié les détails suivans sur le jaguar et le cougouar, qui nous ont paru de nature à offrir quelque intérêt à nos lecteurs.