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SOUVENIRS SUR JOSEPH NAPOLÉON.

mettaient entièrement. Le décret impérial qui traitait l’Espagne en pays conquis, fut publié au moment où Joseph tendait par tous ses efforts à calmer l’exaspération des Espagnols et à étouffer l’insurrection. Le nouvel état de choses qu’on établit, ne pouvait manquer de détruire tout le bien que la conduite noble et mesurée du roi avait produit. Les Espagnols comprirent qu’il s’agissait d’honneur national, ils devinèrent les vues ambitieuses de l’empereur. L’effervescence apaisée se ranima, l’insurrection reprit des forces, les guérilles rentrèrent en campagne.

Trompé dans ses espérances de pacification, Joseph avait quitté l’Andalousie, dont le maréchal Soult avait pris le commandement supérieur[1]. Après cinq mois d’absence, il était revenu à Madrid, mais il n’avait pas attendu l’effet désastreux produit par le décret impolitique de Napoléon pour adresser d’énergiques protestations au chef du gouvernement français. Deux notes avaient déjà été remises à M. le comte de Laforest, ambassadeur de France en Espagne, lorsque, trouvant que ces notes ne produisaient pas assez promptement l’effet qu’il en attendait, le roi ordonna à son ministre des affaires étrangères de se rendre à Paris, en qualité d’ambassadeur extraordinaire. Le but de la mission du duc de Santa-Fé n’était

  1. Au moment où Joseph quitta l’Andalousie, les affaires du parti insurrectionnel paraissaient dans un état si désespéré, même à ceux qui en avaient la direction, que la régence de Cadix, pour ranimer l’esprit d’insurrection prêt à s’éteindre, avait songé à placer un prince de la maison de Bourbon à la tête des troupes destinées à agir contre l’armée de Napoléon.

    Ce fut l’occasion du voyage que M. le duc d’Orléans (aujourd’hui Louis-Philippe Ier) fit, à cette époque, en Espagne. On sait que les intrigues de l’Angleterre s’opposèrent alors à ce qu’un commandement militaire fût donné à ce prince.

    Les cortès, qui se réunirent peu de temps après, au lieu de chercher, comme la régence, un appui dans la coopération d’un homme, crurent devoir en demander à ces grands principes de libertés publiques, qui faisaient tant de partisans au roi Joseph ; ce fut en quelque sorte pour lutter avec lui dans le champ des institutions constitutionnelles, pour le combattre dans son action sur les intelligences, que la célèbre constitution de 1812 fut rédigée. Cela ressort de tous les discours qui furent prononcés