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Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 2.djvu/563

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QUITTE POUR LA PEUR.

LA DUCHESSE (à part).

Il restera.

LE DUC (regardant la pendule).

Demain j’arriverai à temps pour le petit lever. —

C’est une pendule de Julien-le-Roy que vous avez là ?

(Il ôte son épée et son chapeau et les pose sur un guéridon.)
LA DUCHESSE (à part).

Un sang-froid à n’y rien comprendre ! — Quelle inquiétude il me donne !

LE DUC (s’asseyant).

Ah ! ah ! voici quelques livres ! C’est bien ce que l’on m’avait dit : vous aimez l’esprit, et vous en avez ; oh ! je sais que vous en avez beaucoup, et du bon, du vrai, du meilleur esprit. — C’est monsieur de Voltaire ! — Oh ! Zaïre ! — Zaïre vous pleurez !

Lekain dit cela comme ça, n’est-ce pas ?

LA DUCHESSE.

Je ne l’ai pas vu, monsieur.

LE DUC.

Ah ! c’est vrai ! Je sais que vous êtes un peu dévote, vous n’allez pas à la comédie, mais vous la lisez. Vous lisez la comédie… pour la jouer, jamais ! (Avec une horreur comique.) Oh ! jamais !

LA DUCHESSE.

On ne m’y a pas élevée, monsieur, fort heureusement pour moi.

LE DUC.

Et pour votre prochain, madame, mais je suis sûr qu’avec votre esprit vous la joueriez parfaitement… Tenez (nous avons le temps), si vous étiez la belle Zaïre, soupçonnée d’infidélité par Orosmane, le violent, le terrible Orosmane.

LA DUCHESSE (à part).
(À demi-voix à la cloison.)

Ah ! c’est ma mort qu’il a résolue ! — Rosette, prenez garde ! Rosette ! faites bien attention.

LE DUC.

En vérité, madame, c’est le plus généreux des mortels que ce