le marbre ; les capuchons relevés laissaient voir leurs crânes nus et rasés. Il y avait là des jeunes gens et des vieillards. Chacun d’eux y était venu poussé par des sentimens différens, les uns par la foi, les autres par le malheur ; ceux-ci par des passions, ceux-là par le crime peut-être. Il y en avait là dont les artères des tempes battaient comme s’ils avaient du feu dans leurs veines ; ceux-là pleuraient : il y en avait d’autres qui sentaient à peine circuler leur sang refroidi ; ceux-là priaient. Oh ! c’eût été, j’en suis sûr, une belle histoire à écrire que l’histoire de tous ces hommes !
Lorsque les matines furent finies, je demandai à parcourir le couvent pendant la nuit : je craignais que le jour ne vînt m’apporter d’autres idées, et je voulais le voir dans la disposition d’esprit où je me trouvais. Le père Jean-Marie prit une lampe, m’en donna une autre, et nous commençâmes notre visite par les corridors. Je l’ai déjà dit, ces corridors sont immenses ; ils ont la même longueur que l’église de Saint-Pierre de Rome, ils renferment quatre cents cellules, qui autrefois ont été toutes habitées ensemble, et dont maintenant trois cent soixante-treize sont vides. Chaque moine a gravé sur sa porte sa pensée favorite, soit qu’elle fût de lui, soit qu’il l’eût tirée de quelque auteur sacré. Voici celles qui me parurent les plus remarquables :
ACCENDE ME TOTUM IGNE TUO.
DIEU T’A FAIT POUR L’AIMER ET NON POUR LE COMPRENDRE.