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Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 3.djvu/617

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RÉVOLUTION DU MEXIQUE.

aussi inhabile ne peut guère être motivé que par la haine qu’on lui connaissait pour Santa-Anna.

Pour juger des opérations de l’un et de l’autre parti, il suffit de se représenter le but principal auquel chacun d’eux devait aspirer. Là, comme en France, la possession de la capitale est d’un grand poids dans la balance des affaires, ou plutôt toutes les provinces suivent à l’envi l’impulsion donnée par le siège du gouvernement. C’était donc à Mexico que Santa-Anna devait arriver en vainqueur : du palais de Montézuma ses arrêts devenaient des lois ; partis de tout autre lieu, ils n’étaient que les cris d’un rebelle[1]. Les ministres le sentaient ; aussi leur général ne s’avançait-il que lentement, se recrutant par tous les moyens imaginables, et cherchant à faire sortir Santa-Anna de la Vera-Cruz, pour l’attirer loin du centre de ses ressources ; là, une seule défaite l’eût anéanti. Mais Santa-Anna comprenait bien sa position ; il savait que la Vera-Cruz serait le tombeau des troupes de l’intérieur, et d’ailleurs il était sûr d’y trouver, en cas de revers, un moyen de s’échapper par mer. Cette ville, située sur le golfe du Mexique, est entourée d’une muraille à peine susceptible de soutenir un coup de main ; cependant, du côté de la mer, elle est protégée par l’îlot et le château de Saint-Jean de Ullua : cette forteresse était un asile assuré au général. Le climat brûlant de cette partie du littoral est mortel pour les habitans des provinces intérieures : voilà le grand auxiliaire sur lequel comptait Santa-Anna, et il resta paisiblement à la Vera-Cruz, attendant que la saison des pluies vînt décimer les bataillons ennemis avec plus de fureur que le fer et le canon. Néanmoins il ne négligeait aucun moyen de défense ; toutes les batteries du château furent relevées, et la place approvisionnée pour plusieurs mois. Il arma deux goëlettes et plusieurs bâtimens légers pour protéger les côtes et couper au gouvernement toute communication avec l’extérieur ; en un mot, il fit les dispositions nécessaires à un long siège. Il veilla surtout à ce que le mouvement révolutionnaire ne suspendît pas un instant la marche des affaires. Les lois conservèrent toute leur action, les engagemens contractés par le gouvernement avec les na-

  1. Le congrès général siège à Mexico, et il vote toujours pour le chef entre les mains duquel est la ville.