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Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 3.djvu/626

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au mépris des lois existantes conservait une autorité dont il était indigne ; tandis que Santa-Anna se présentait, non plus comme simple médiateur entre l’armée et le gouvernement, mais comme général en chef des troupes du président légitime de la république. Il ne s’agissait plus que d’obtenir le consentement de Pedraza, et il n’était guère douteux que celui-ci ne le donnât bientôt.

C’était beaucoup que d’avoir su mettre la légalité de son côté ; mais, tout en profitant de cet avantage, Santa-Anna sentait bien que ce serait réellement la force qui déciderait en dernier ressort, et il continuait à agir avec vigueur : dès le 17 mai, il avait quitté la Vera-Cruz à la tête de mille hommes environ et d’un train assez considérable d’artillerie pour se mettre à la poursuite des troupes du gouvernement : considérant toujours cette ville comme le centre de ses opérations, son principal point d’appui, et surtout comme un asile assuré en cas de revers, il y avait laissé la moitié de ses troupes ; les forces qu’il emmenait lui paraissaient plus que suffisantes pour harceler l’ennemi et même engager au besoin avec lui une bataille rangée. Quoiqu’il s’exagérât la détresse de l’armée ministérielle, l’état où elle se trouvait réduite était réellement déplorable : au moment de la levée du siège, le nombre des malades s’élevait à neuf cents, et la contagion qui décimait ces malheureux laissait des traces si profondes, que la plupart des convalescens eux-mêmes n’étaient pas en état de porter les armes. En vain le gouvernement, pour protéger sa retraite, avait-il envoyé des troupes fraîches, Santa-Anna qui connaissait parfaitement le pays trouvait moyen de rendre ces secours presque inutiles ; il interceptait les convois, et ce n’était pas sans peine que l’armée en retraite conservait quelques communications avec Mexico. Le colonel Mendaca, auquel était confiée la garde de l’important point de Jara, à trois lieues de Jalapa, venait de se déclarer pour le mouvement révolutionnaire ; et les villes de Cordova et d’Orizaba, situées sur la route de la capitale, les avaient imitées, avant même la nouvelle de la fuite de Calderon : tout réussissait au gré de Santa-Anna. Cependant il fut arrêté dans sa marche ; le colonel Rincon, à la tête de douze cents hommes de troupes fraîches, l’attendait à Puente Nacional et se disposait à l’attaquer, et il l’eût sans doute défait, car Santa-Anna, croyant les ministérialistes aux abois, avançait sans