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REVUE DES DEUX MONDES.

quand le peuple se plaint du sénat, pourquoi ne nous plaindrions-nous pas de notre maître ? Je veux parler, comme au temps où réunis à la voix de Spartacus… Mais que sont devenus pour toi tous ces souvenirs ?

VERCINGETORIX.

Je n’ai rien oublié.

PREMIER ESCLAVE.

Tant pis ! n’as-tu pas honte alors d’être le premier d’entre nous ?

SECOND ESCLAVE.

Il faut le plaindre : si le maître a faim, c’est lui qu’il appelle ; s’il ne peut dormir, c’est encore lui ; s’il est malade, c’est lui ; s’il a peur du tonnerre, c’est lui. Bien m’a pris d’être récalcitrant, le fouet m’exempte de bien d’autres tortures.

VERCINGETORIX.

Toujours des plaintes, toujours des reproches ; je n’ai qu’un maître ici.

PREMIER ESCLAVE.

Il ne tiendrait qu’à toi de n’en avoir plus.

VERCINGETORIX.

Vous êtes fous, votre haine aveugle ne tombe que sur un seul, mais après celui-ci, le bourreau.

DEUXIÈME ESCLAVE.

Mieux vaut le bourreau.

PREMIER ESCLAVE.

Pour en finir avec Spartacus, il a fallu d’autres armes que les verges et la hache !

VERCINGETORIX.

S’il a succombé, que prétends-tu, toi ? quel est ton plan ? quelles sont tes ressources ? ton nom remuera-t-il la Sicile, l’Espagne, le Latium ? nous ne serions que les petits imitateurs d’un grand homme.

PREMIER ESCLAVE.

Que faire alors ?

VERCINGETORIX.

Tuer les maîtres par les maîtres.

PREMIER ESCLAVE.

Et pour cela ?