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dans quelques-uns. Surpassés maintenant dans la fabrication de la soie, ils l’emportent encore sur nous pour la porcelaine et pour la composition de leur encre ; seuls ils savent cultiver et préparer le thé, dont l’usage presque universel a fait de leur commerce un besoin pour le monde. La priorité de leur industrie dans certaines inventions d’une utilité capitale, est incontestable : nul doute que de temps immémorial on n’ait connu la boussole à la Chine ; que l’imprimerie n’y date de l’an 952, et le papier-monnaie de 1154 ; qu’il n’y ait eu de l’artillerie au xe siècle, et au commencement du xiie des cartes à jouer, deux cents ans avant qu’on fasse mention en Europe de la gravure sur bois.

La question est de savoir si l’Occident a reçu de l’Orient ces diverses inventions, ou si, comme on le croit généralement, il y est arrivé par lui-même de son côté.

Cette question est importante ; on ne peut dire qu’il soit indifférent pour l’histoire de la civilisation de connaître d’où sont venues des découvertes qui ont influé à tel point sur elle ; et notre dédain pour les Chinois, qui nous semblent plutôt des magots que des hommes, serait un peu humilié, s’il se trouvait que nous leur devons ces trois choses : l’imprimerie, la boussole et la poudre à canon.

Cette grave question a occupé M. Rémusat, et s’il n’a pas cru pouvoir la trancher par une solution précise, on voit assez de quel côté il inclinait.

L’antériorité démontrée de ces inventions à la Chine et l’incertitude où l’on est en Europe touchant leur berceau et les auteurs qu’on leur a prêtés, forment, il faut l’avouer, un préjugé favorable pour l’opinion qui les fait venir de l’Orient.

La boussole a été apportée par les Arabes dont les embarcations commerciales allaient, comme on sait, rencontrer les jonques marchandes des Chinois dans les ports de l’Inde. La poudre à canon et l’imprimerie seraient venues par la voie de terre. Remarquez que ces deux découvertes sont réclamées par plusieurs pays, et que leur date n’est pas bien certaine. En outre, d’après toutes les vraisemblances, c’est en Allemagne qu’on les voit d’abord se produire ; or, c’est en grande partie par l’Allemagne que s’établirent au moyen-âge, avec l’orient de l’Europe, et par suite avec toute l’Asie, ces communications prodigieusement multipliées, qu’une des gloires