glise. C’est l’heure de la danse des morts. Tous les morts ont entendu la voix de la cathédrale. Les voilà. Ils viennent, ils viennent pour la danse. Ils viennent à pas légers, sans bruit dans les galeries, sans bruit dans les chapelles, sans bruit dans le jubé, comme la neige qui tombe par flocons dans un verger par une nuit de Noël. Les voyez-vous ? Ils ont tous pris leurs habits de fête ; à présent ils se penchent sur les balcons comme des cascatelles sur leurs rochers. Oh ! qu’ils ont l’air triste les morts pour venir à la danse ! Quand les feuilles de chêne tourbillonnent sous le vent dans les carrefours de bruyère, elles ne regrettent pas autant la cime du chêne, ni le creux de la grotte. Mes larmes tombent goutte à goutte sur mon auréole. Mais que pensent-ils de regarder avec leurs yeux vides du côté de l’horloge ? À présent ils se pendent avec les dents aux grilles du chœur ; ils se cramponnent avec leurs ongles aux dragons des piliers ; ils s’accoudent dans les niches ; ils se heurtent, ils se broient sous les voûtes, sur les degrés du maître-autel. À présent, les portes sont fermées, l’église est pleine. Que font les papes et les archevêques ? Ils gardent leurs mitres sur leurs chefs ; après eux viennent les rois qui portent leurs couronnes sur leurs fronts de squelettes ; après les rois, six mille comtes qui couvrent leurs nuques de leurs manteaux. Voyez-les ! les rangs se serrent pour leur faire place. Les voilà maintenant qui se donnent la main. Ils font une grande ronde dans la nef, et ils vont commencer à chanter. Que vont-ils dire ? Leurs pieds nus sonnent sur les dalles. Leurs épées claquent à leurs côtés dans le fourreau. Leurs têtes branlantes s’entrechoquent : la cathédrale bondit avec eux comme une barque par la tempête sur la mer de Galilée.
Rentrons dans nos caveaux. Nos paupières sont trop pesantes ; nos cheveux secouent autour de nous une poussière trop humide ; nos mains, qui pendillent, sont trop froides……… ô Christ ! ô Christ ! pourquoi nous as-tu trompés ? ô Christ ! pourquoi nous as-tu menti ? Depuis mille ans, nous nous roulons dans nos caveaux, sous nos dalles ciselées, pour chercher la porte de ton ciel. Nous ne trouvons que la toile que l’araignée tend sur nos têtes. Où sont donc les sons des violes de tes anges ? Nous n’entendons que la scie aiguë du ver qui ronge nos tombeaux. Où est le pain qui devait