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En conséquence, le 24, à onze heures du soir, une brillante mogiganga, sortie du Saladero, se dirigea vers le palais par la rue Mayor, ayant en tête le seignero corrégidor, — à cheval et en bas de soie, ainsi que le jour de l’entrée publique ; — car on met le corrégidor à tous les cortèges possibles, de même que la rue Mayor leur sert également à tous de passage inévitable.

Comme la mascarade royale se composait essentiellement de tableaux allégoriques dont, malgré toute votre sagacité, vous ne saisiriez peut-être pas toujours facilement le sens, pour vous le faire bien comprendre, je m’aiderai du singulier programme explicatif qu’en publia d’avance Son Excellence el Ayutamiento de Madrid, afin, sans doute, d’épargner à la foule le danger de se méprendre dans ses interprétations.

La mogiganga se divisait en trois troupes distinctes qui s’avançaient toutes entre une double haie de volantes portant des torches allumées, — et de grenadiers provinciaux, lesquels frayaient au besoin le chemin avec les baïonnettes de leurs fusils.

La marche était ouverte par la musique d’un des régimens de la garnison. — Venait ensuite un groupe de guerriers vêtus et armés à l’antique.

Cela figurait la constante loyauté de l’armée espagnole envers ses rois bien-aimés, pour la défense desquels elle est toujours prête à verser jusqu’à la dernière goutte de son sang, et faisait en même temps allusion aux gloires immortelles de la nation.

Le groupe des guerriers était suivi d’un groupe de génies couronnés, jetant des fleurs au vent.

Le second groupe représentait les doux zéphirs, les tendres amours et les ris innocens, qui planaient au-dessus du berceau doré où croissait, réservée au trône de Recaredo, et destinée à combler le bonheur de ses sujets, la fille adorée de Ferdinand et de Christine.

Sur un char resplendissant, attelé de six chevaux, paraissait l’Aurore aux doigts de rose, les cheveux flottans, une torche à la main droite, la Nuit et le Sommeil à ses pieds. — Les Heures et les Graces marchaient autour du char, chacune avec ses attributs.

Cet emblème signifiait que la princesse, objet de l’amour des Espagnols, était la consolation et l’espérance du trône où elle était