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M. Sébastiani ne fut pas réélu en 1824, et il ne rentra dans la chambre que vers le commencement de l’année 1826. Dans cette longue guerre qu’il soutint contre le ministère de M. de Villèle, M. Sébastiani se montra, comme de coutume, le partisan le plus chaud de la publicité, et il demanda avec beaucoup de persévérance la communication des transactions et des comptes relatifs à la guerre d’Espagne. Ce n’était cependant, comme autrefois, que dans les comités secrets qu’il déployait sa pensée avec quelque étendue. Là du moins il lui était permis de reprendre ses habitudes de salon et du monde, de s’admirer parler, et de s’entourer, comme dans son brillant hôtel, d’amis et de complaisans qui l’écoutaient avec déférence. Les exigences de la vie publique, telle que l’a faite le régime représentatif, convenaient peu au général Sébastiani, et sa nature demi-turque, demi-italienne, s’accommodait mal de cette multitude de petits devoirs et de petits soins qu’entraînent les fonctions d’un député qui veut parvenir. C’était une rude tâche pour le général Sébastiani, qui menait la vie d’un grand seigneur et d’un vieux seigneur de l’ancien régime, que de quitter ses flatteurs, ses créatures, ses nombreux laquais, et de venir, à l’issue du petit lever presque royal qu’il tenait dans ses somptueux appartemens du Faubourg-Saint-Honoré, solliciter quelques instans d’attention à la tribune, souffrir des attaques peu mesurées et de fâcheuses contradictions, ou quêter une mention auprès des journalistes. Ainsi jeté dans le parti libéral, M. Sébastiani se trouvait sans cesse à la gêne, et il était vraiment curieux de le voir se débattant contre les conséquences de sa situation. Jugez combien il dut se trouver heureux, après ce long martyre, quand la révolution de juillet l’eut doté d’un ministère, et lorsqu’il se vit enfin à la place qu’il convoitait depuis si long-temps dans le salon occupé successivement par M. de Richelieu, M. de Chateaubriand et M. de Polignac, recevant autour de son foyer non plus les gazetiers, comme il disait, non plus les gauches électeurs de Vervins, qui l’envoyèrent à la chambre quand les électeurs de la Corse l’eurent abandonné, mais des ministres, des ambassadeurs, et le nonce du pape, que M. Sébastiani retenait avec tant de grâce par ses glands de soie, dans une embrasure de croisée.

Il est inutile de vous dire, monsieur, que, pour arriver là, le gé-