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HOMMES D’ÉTAT DE L’ANGLETERRE.

souvent un côté faible ouvert à son ennemi. Peel est froid et contenu, exact dans les détails, ferme dans son raisonnement ; il exerçait une puissante influence sur la chambre par un certain air de candeur et d’honnêteté, et un mépris apparent de tout artifice de rhétorique. Contre un antagoniste ainsi préparé, la véhémence insultante des invectives de Brougham était le plus souvent sans force. Peu de cabinets anglais ont possédé tant de talens que celui de 1828, et aucun n’a eu à un plus haut degré la confiance du monarque ; mais ses membres s’étaient placés eux-mêmes dans une position fausse, en prenant, à leur entrée au pouvoir, un ton de défiance déclaré contre l’esprit de leur époque, que d’ailleurs il leur fut impossible de conserver, qu’ils furent obligés peu à peu de modifier et d’abandonner ; si bien qu’après être sortis de plusieurs de leurs principes, ils se virent forcés de faire ce que, pour la considération de leur caractère, ils auraient dû faire long-temps auparavant : ils cédèrent aux événemens qu’ils n’avaient pu empêcher. Le duc de Wellington, avec toute sa franchise militaire et ses talens administratifs, ne put ni résister aux événemens avec dignité ni en profiter avec adresse.

L’histoire de cette administration ne forme pas un chapitre important dans la vie de lord Brougham, qui, quoiqu’à la tête de l’opposition whig, fut moins en évidence dans le parlement pendant ces deux dernières années qu’il ne l’avait été jusque-là.

Les ministres cédèrent d’abord aux religionnaires dissidens le rappel du test et des actes de corporations, vieux statuts que la désuétude avait virtuellement abolis, et auxquels l’église d’Angleterre adhérait encore, comme un rajah que la compagnie des Indes a silencieusement dépossédé de son autorité, conserve encore les emblèmes d’un pouvoir dont il a cessé de jouir depuis long-temps ; enfin ils abandonnèrent aux catholiques l’importante question de l’émancipation. Les débats qui précédèrent cette fameuse concession se distinguèrent par leur durée et par la violence de la lutte. Tout homme qui a étudié le caractère du temps ne peut blâmer Wellington et Peel d’un changement d’opinion qui leur fut imposé par la nécessité ; mais leurs amis doivent regretter les déclarations violentes auxquelles ils avaient été entraînés par leur hostilité contre Canning, et qui les mettaient dans l’impossibilité