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Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 3.djvu/158

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REVUE DES DEUX MONDES.

des actes de déférence l’aigreur de son ressentiment. Un diacre de l’église métropolitaine de Tours partit pour Soissons, ville royale de Neustrie, avec la mission de faire un récit exact de tout ce qui venait d’avoir lieu. Il eut pour compagnon, dans cette ambassade, un parent de l’évêque, appelé Nicetius, qui se rendait à la cour de Hilperik pour des affaires personnelles[1].

Arrivés au palais de Soissons et admis ensemble à l’audience royale, ils commençaient à exposer les motifs de leur voyage, lorsque Fredegonde survint et dit : « Ce sont des espions, ils viennent s’informer ici de ce que fait le roi, afin d’aller ensuite le rapporter à Merowig. » Ces paroles suffirent pour mettre en émoi l’esprit soupçonneux de Hilperik. L’ordre fut donné aussitôt d’arrêter Nicetius et le diacre porteur du message. On les dépouilla de tout l’argent qu’ils avaient sur eux, et on les conduisit aux extrémités du royaume, d’où ils ne revinrent l’un et l’autre qu’après un exil de sept mois[2]. Pendant que le messager et le parent de Grégoire de Tours se voyaient traités d’une si rude manière, lui-même reçut de la part du roi Hilperik une dépêche conçue en ces termes : « Chassez l’apostat hors de votre basilique, sinon j’irai brûler tout le pays. » L’évêque répondit simplement qu’une pareille chose n’avait jamais eu lieu, pas même au temps des rois goths qui étaient hérétiques, et qu’ainsi elle ne se ferait pas dans un temps de véritable foi chrétienne. Obligé par cette réponse de passer de la menace à l’effet, Hilperik se décida, mais avec mollesse ; et grâce à l’instigation de Fredegonde qui n’avait aucune peur du sacrilège, il fut résolu que des troupes seraient rassemblées, et que le roi lui-même se mettrait à leur tête pour aller châtier la ville de Tours et forcer l’asile de Saint-Martin[3].

  1. Nicetius vir neptis meæ, propriam habens causam, ad Chilpericum Regem abiit cum Diacono nostro, qui regi fugam Merovechi narraret. Greg. Turon. hist., lib. v, pag. 289.
  2. Quibus visis, Fredegundis regina ait : « Exploratores sunt, et ad sciscitandum quid agat rex advenerunt, ut sciant quid Merovecho renuntient. » Et statim exspoliatos in exilium retrudi præcepit, de quo mense septimo expleto relaxati sunt. Greg. Turon, ibid.
  3. Igitur Chilpericus nuntios ad nos direxit, dicens : « ejicite apostatam illum