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DES LÉGISLATIONS COMPARÉES.

directement aux affaires et aux intérêts des sociétés, elle s’appelle la politique.

Appeler la science qui dirige les sociétés science politique, c’est parler avec exactitude et propriété ; et l’expression antique πόλις, πολιτεία, τὰ πολιτιϰὰ (polis, politeia, ta politika) reste juste : elle embrasse le fond et la forme des choses. Depuis quelque temps on semble préférer le mot social ; c’est une variante qui n’a pas d’inconvéniens.

La science politique ou sociale, ou la science de la législation, c’est la même chose ; c’est la recherche des lois philosophiques de l’humanité, c’est l’intelligence de ses destinées historiques : la science de la législation repose donc sur un système et sur une histoire.

On ne vit véritablement dans son siècle qu’à la condition d’en trouver la raison et la loi : cette étude a ses degrés et ses phases et ne peut aboutir à un système qu’après un temps marqué. Les principes dirigeans du système nouveau ne sont pas lents à paraître quand la méthode est bonne et la tête ferme : mais le temps leur est nécessaire pour se constituer et mûrir, pour trouver des appuis et des témoignages tant dans la vie de l’homme et du siècle même que dans les destinées précédentes de l’humanité, c’est-à-dire dans l’histoire.

Il est impossible d’écrire l’histoire des idées et des lois sans l’intervention de principes dirigeans, par la raison qui veut que l’histoire des mathématiques soit écrite par un mathématicien. Mais dans l’ordre moral les principes ayant moins de certitude logique que les vérités mathématiques, gagnent davantage à l’épreuve de l’histoire ; en même temps qu’ils la rendent possible et féconde, ils en reçoivent leur confirmation et quelquefois leur redressement ; échange utile entre l’expérience des faits et les lois de la raison.

Sitôt qu’il fut de mon devoir et de ma destinée d’enseigner l’histoire des législations comparées, je trouvai sur-le-champ l’idée à produire la première sur la scène ; toute unité se conçoit d’un seul coup ; certains principes dirigeans ne tardèrent pas non plus à poindre dans ma tête et à s’y préciser progressivement ; peu à peu ils rallièrent à eux mes recherches historiques, ils me servirent de soutiens dans l’étude des faits, et puis eux-mêmes grandirent par cette étude. J’enseignai l’histoire du pouvoir législatif ; l’unité