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tocle conçut de procurer l’empire de la mer à Athènes, il lui devina son génie maritime, il la contraignit d’abandonner ses murailles pour se promener sur les flots, il la reprit du sein des mers et la rendit à de nouveaux remparts, qui s’élevèrent en dépit de Lacédémone, donnant deux fois la gloire et la vie à sa chère et ingrate patrie. Périclès conçut de ne rien conquérir et de tout conserver, de réduire Sparte au second rang par l’heureuse sagesse d’une guerre persévérante, et de mettre la gloire acquise sous la tutelle d’une modération qui ne se démentirait pas. Alcibiade ne conçut rien ; il courait à la gloire comme à un divertissement, sans plan et sans réflexion, le plus aimable et le plus étourdi des adolescens, jouissant avec insolence des faveurs de la nature et du peuple, idolâtré des Athéniens, condamné par eux, voulant s’en venger, les aimant toujours, réduit par leur folie à ne pouvoir les sauver après les avoir poussés dans une entreprise folle, succombant avec courage sous la flèche perfide du Perse ; il traversa la célébrité sans trouver la vraie gloire, trop léger pour être assez grand.

À Athènes l’influence aristocratique était exercée par l’aréopage, qui étendait une censure morale sur l’éducation, la religion et les mœurs ; l’influence timocratique par le sénat, composé de cinq cents membres élus tous les ans, qui administrait et gouvernait ; l’influence démocratique, par l’assemblée du peuple, qui se réunissait quatre fois en trente-six jours, examinait la conduite des généraux et des magistrats, adoptait les lois proposées par ses hommes d’état et ses orateurs.

Faut-il s’étonner si la démocratie athénienne fit des fautes et dura peu ? Pour la première fois, la liberté se montrait ; elle put tâtonner et s’égarer ; c’était un essai : et l’esprit humain se déborda lui-même dans l’ardeur de son activité. La philosophie produisit les sophistes, l’éloquence accoucha des rhéteurs, la démocratie eut ses démagogues : tristes enfantemens : mais il n’a été donné ni aux rhéteurs, ni aux sophistes, ni aux démagogues de déconsidérer et de perdre l’éloquence, la philosophie et la liberté.

L’Italie n’eut pas assez dans l’histoire d’être le théâtre de Marius et de Sylla, elle se mêla puissamment aux premiers mouvemens de la démocratie moderne. Dans le moyen âge, proprement