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Page:Revue des Deux Mondes - 1834 - tome 3.djvu/338

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REVUE DES DEUX MONDES.

Et les déroule de sa main.
Le regard qui s’était éteint,
De son regard il le rallume ;
Au sabre rouillé dans la brume
Il donne, rien qu’en le touchant,
De sa colère le tranchant ;
Aux chevaux qui mordent leurs brides
De ses pensers les pieds rapides :
Et son aigle aux ailes d’airain,
Il le réchauffe sur son sein.

En le voyant ses soldats disent :
— Je vais où ses pieds me conduisent.
Ma blessure de Waterloo
Me gêne trop dans le tombeau.
Plus que le sable d’Arabie,
Plus que le soleil de Syrie,
Le cœur me brûle en y pensant,
Et le chagrin tarit mon sang.

— Écoutez ! la trompette sonne.
Je suis ses pas sans savoir où.
Ah ! dans ma tombe de Moscou,
Il fait trop froid quand vient l’automne,
Mon fusil à mon bras glacé
M’a trop dans ma fosse lassé ;
Et comme une neige nouvelle
Mon rêve sur moi s’amoncelle.

— Je pars, j’ai repris mon fusil.
Cette fois, où me mène-t-il ?
Ah ! dans ma tombe d’Allemagne
Il fait trop sombre et trop de vent ;
Trop noir dans ma tombe d’Espagne,
Et le muletier trop souvent,
En sifflant une barcarole,
Y vient charger son espingole. —

Pendant qu’il passe dans les rangs,
Il parle aux morts comme aux vivans :